Développée à marche forcée, la roquette Thundart veut offrir à la France une supériorité terrestre redoutable, en doublant la portée du célèbre HIMARS tout en échappant aux contraintes américaines. Un pari audacieux à plusieurs centaines de millions d’euros.
À l’heure où l’Europe cherche son autonomie stratégique, Paris dégaine enfin son arme miracle. Baptisé Thundart, ce nouveau système de roquettes guidées vise à dépasser le HIMARS américain sur le terrain. Une initiative à la fois militaire, industrielle et politique, qui pourrait rebattre les cartes des ventes d’armes en Europe. Objectif affiché : une portée de 150 km, une production 100 % nationale, et une exportabilité sans l’ombre d’un véto américain.
A lire aussi :
- L’Inde rentre dans un club très fermé où la France brille par son absence : celui des pays possédant une piste dédiée aux essais dynamiques de sièges éjectables
- Les États-Unis enchaînent les fiascos militaires : ces armes inutilisables dépassent le prix d’un Rafale, pendant que la Chine bâtit la première armée du monde en silence
Une urgence stratégique pour l’armée française
Depuis la guerre en Ukraine, les armées européennes ont compris l’importance des frappes terrestres à longue portée. Pour la France, le constat est simple : son Lance-Roquettes Unitaire (LRU), basé sur le M270 américain, ne suffit plus. Sa portée actuelle de 70 km le rend obsolète face aux nouveaux enjeux. Il faut un système plus mobile, plus précis, et surtout plus autonome. Avec seulement 9 unités en service, le retrait du LRU prévu pour 2027 crée un vide critique. D’où l’accélération d’un programme lancé en 2023 : le FLP-T (Feu Longue Portée Terrestre). Et au cœur de ce plan, deux industriels s’affrontent : MBDA/Safran avec la roquette Thundart, et Thales/ArianeGroup avec un projet concurrent encore confidentiel.
Thundart : la réplique française au HIMARS
Le Thundart, développé par MBDA, n’a rien à envier à son homologue américain. Il repose sur un calibre de 227 mm, identique au HIMARS, mais embarque des technologies françaises éprouvées. Le système de guidage s’appuie sur celui de la bombe AASM Hammer, déjà utilisée avec succès par l’aviation française en Ukraine et au Sahel. Ce guidage mixte GPS/INS est capable d’atteindre des cibles fixes avec une grande précision. Des options multi-modes, avec imagerie infrarouge ou laser semi-actif, sont prévues pour viser des cibles mobiles. Même en cas de brouillage GPS, le système conserve une précision de haut niveau. Un vrai bond technologique pour l’armée de Terre.

Une production nationale… et sans contrainte américaine
L’un des atouts majeurs du Thundart, c’est son statut “ITAR-free”. En clair, aucun composant ne dépend des règles d’exportation américaines. Contrairement aux HIMARS ou aux ATACMS, il pourra être vendu à tout pays client, sans feu vert de Washington. Une liberté qui ouvre des marchés jusqu’ici fermés. Le site de production MBDA à Bourges est déjà prêt à fabriquer en masse ces roquettes. Une montée en cadence est prévue dès 2026, si le système est retenu. Et le budget suit : 600 millions d’euros sont inscrits dans la Loi de Programmation Militaire 2024-2030, pour financer le développement et l’achat de 26 lanceurs d’ici 2035.
5h : réveil du colonel 🛎️
Champagne & sardines 🥂
Obus de 43 kg 💪
Pendant ce temps, #THUNDART se prépare : 150 km de portée, précision renforcée.
Bonne #SainteBarbe à tous les artilleurs !@SAFRAN pic.twitter.com/002D0QO1rO— MBDA France (@MBDAFrance) December 4, 2025
Objectifs : portée doublée et haute mobilité
Le cahier des charges du FLP-T est clair : il faut dépasser les 70 km du LRU actuel et atteindre 150 km de portée. MBDA annonce un Thundart capable de frapper à plus de 93 miles, soit 150 km, avec une précision chirurgicale. Une allonge qui permettrait à la France de neutraliser des cibles stratégiques en profondeur, sans exposer ses troupes. Le système sera monté sur un châssis 8×8 tout-terrain, avec une capacité de tir autonome, sans besoin de radar externe. Il pourra être intégré dans la doctrine d’emploi du CAESAR, le célèbre canon automoteur français, pour augmenter la saturation et le temps de réaction face à une menace.
Une rude concurrence sur le marché européen
Mais la route du Thundart est semée d’embûches. Le marché européen est déjà saturé par des systèmes concurrents. Le HIMARS est en service en Italie, Roumanie, Lituanie, Estonie… L’Allemagne, les Pays-Bas, le Danemark et l’Espagne ont opté pour le PULS israélien. Même la Corée du Sud avec son Chunmoo a trouvé preneur en Pologne. Plusieurs industriels européens veulent aussi leur part du gâteau. Rheinmetall et Lockheed Martin planchent sur le GMARS, version à roues du HIMARS. Pendant ce temps, l’UE pousse à acheter “local”. La fenêtre de tir pour Thundart est donc étroite, mais réelle.
Une décision cruciale attendue en 2026
Le Ministère des Armées a fixé une date : mi-2026, les deux projets (MBDA/Safran et Thales/Ariane) devront démontrer leurs capacités au tir. Le vainqueur sera alors sélectionné pour un déploiement d’ici 2030. Cette compétition 100 % française est rare à ce niveau de technologie, preuve que la souveraineté industrielle redevient une priorité. Mais si aucun système ne convainc, un achat sur étagère à l’étranger reste possible. Ce serait un camouflet politique pour Paris, et un retour en arrière stratégique. Car l’objectif est clair : disposer d’un système “made in France”, performant, fiable, et compétitif.
Vers une montée en gamme hypersonique
En parallèle du FLP-T, la France explore déjà l’après-Thundart. Un projet de missile hypersonique terrestre, avec une portée entre 500 et 1 000 km, est à l’étude. Ce saut capacitaire répond aux ambitions du programme ELSA (European Long-Range Strike Approach), porté par la France, l’Allemagne, l’Italie et la Pologne. Objectif : développer une capacité européenne de frappe à très longue portée, indépendante des Tomahawk ou autres missiles de croisière américains. MBDA propose déjà son Land Cruise Missile, version terrestre du missile de croisière naval NCM, en attendant que les technologies hypersoniques soient matures.
Calendrier du programme FLP-T et du Thundart
| Étape | Date prévue | Détail |
| Lancement du FLP-T | 2023 | Définition des besoins et appel à projets |
| Début du développement | Fin 2023 | MBDA et Thales/ArianeGroup sélectionnés |
| Présentation du Thundart | Juin 2024 | Maquette dévoilée à Eurosatory |
| Premiers tirs d’essai | Mi-2026 | Démonstration en conditions réelles |
| Sélection finale du système | Fin 2026 | Choix entre Thundart ou le projet concurrent |
| Début de production | 2027-2028 | Selon le calendrier industriel validé |
| Entrée en service | Avant 2030 | Objectif de 13 systèmes pour 2030, 26 pour 2035 |
| Retrait des LRU actuels | 2027 | Fin de vie des 9 systèmes MLRS français |
Source : TWZ