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Ce pays d’Europe lance un défi à son industrie de l’armement en voulant remplacer le mythique missile Tomahawk par un équivalent « maison »

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Guillaume Aigron

Guillaume Aigron

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Le pari audacieux des Pays-Bas : un missile de croisière maison pour remplacer le Tomahawk. Le secrétaire d’État néerlandais à la Défense, Gijs Tuinman n’a pas hésité lors du salon …

Ce pays d'Europe lance un défi à son industrie de l'armement en voulant remplacer le mythique missile Tomahawk par un équivalent « maison »

Le pari audacieux des Pays-Bas : un missile de croisière maison pour remplacer le Tomahawk.

Le secrétaire d’État néerlandais à la Défense, Gijs Tuinman n’a pas hésité lors du salon NEDS à Rotterdam, le 20 novembre 2025, à lancer un défi à l’industrie de son pays : concevoir un missile de croisière national, à longue portée, en six mois.

Un équivalent local au mythique missile américain Tomahawk, agile, efficace, et surtout produit sur le sol néerlandais.

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Le marché mondial des missiles est saturé. Trop de demandes, pas assez de livraisons. Même les partenaires historiques n’ont plus les coudées franches pour fournir à temps. Dans ce contexte tendu, les petits pays (les Pays-Bas compris) passent souvent après les géants.

Face à cette réalité, l’option d’un missile développé aux Pays-Bas prend des allures de nécessité. L’industrie locale a été invitée à coopérer, à innover, à déposer un premier concept en moins de six mois. En contrepartie, le ministère s’engagerait sur une commande pluriannuelle, histoire de garantir un volume de production viable.

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La précision en profondeur

Ce que cherche La Haye, c’est un missile de précision, à longue portée, capable de frapper à distance dans des environnements où les drones n’ont ni la portée ni la robustesse. Dans les mots de Tuinman, « il nous faut un effet que seuls les missiles peuvent encore garantir ».

La solution devra être simple à produire, rapide à intégrer, peu coûteuse. Pas question de singer le Tomahawk, véritable bijou d’ingénierie conçu pour l’US Navy. L’objectif, c’est une arme rustique mais redoutablement efficace, avec un guidage moderne, des composants déjà disponibles, et une chaîne de fabrication rationalisée. Ce missile, s’il voit le jour, sera aussi destiné à l’export.

En parallèle, la commande de 175 Tomahawk

Ce projet national n’empêche pas les Pays-Bas de poursuivre plusieurs pistes. En avril 2025, une commande américaine a été validée pour 163 Tomahawk Block V et 12 Block IV, intégrés aux frégates De Zeven Provinciën via les silos verticaux Mk 41. Un premier tir d’essai a déjà eu lieu en mars depuis le Zr.Ms. De Ruyter, en coopération avec l’US Navy. Montant de l’opération : environ 2,19 milliards de dollars.

Ces missiles offrent aux Pays-Bas une capacité immédiate de frappe navale, à plus de 1 500 km. Mais ils ne peuvent pas être utilisés depuis les sous-marins néerlandais. La variante UGM‑109 n’est plus produite. Trop coûteux de relancer une chaîne complète pour quelques tubes lance-torpilles.

L’option européenne : le JSM-SL pour les futurs Orka

Pour ses sous-marins, La Haye mise désormais sur une autre carte : le Joint Strike Missile – Submarine Launched (JSM-SL). Il s’agit d’un missile norvégien, le JSM, adapté pour les tubes lance-torpilles. Il offrira plus de 300 km de portée, une trajectoire en rase-mottes, et un guidage intelligent mixant GPS, imagerie infrarouge et radiofréquence passive. Une intégration est prévue vers 2032 sur les sous-marins Orka.

On le voit : la stratégie néerlandaise s’articule en cercles concentriques. Le Tomahawk pour l’immédiat, le JSM-SL pour les sous-marins, et une solution nationale à moyen terme. L’enjeu est clair : réduire les dépendances et muscler l’autonomie industrielle.

Le Tomahawk, missile culte et inimitable

Le Tomahawk reste la référence. Long de 5,5 mètres, pesant environ 1 300 kg, il combine un moteur turbofan Williams F107 et un vol à 880 km/h en suivi de terrain, quasiment indétectable. Sa charge : 450 kg d’explosifs, et un guidage redondant avec GPS, inertiel, reconnaissance de terrain et d’image. Il peut changer de cible en vol, loiter (patrouiller) avant frappe, et frapper en toute autonomie à plus de 1 500 km.

Depuis 1991, il a servi dans presque toutes les guerres menées par les États-Unis : Guerre du Golfe, Balkans, Irak, Syrie, Libye. L’arme du premier soir. Celle qu’on envoie sans avertir.

Mais à 2 millions d’euros pièce, avec une chaîne de production tendue, il devient difficilement accessible aux forces moyennes. D’où l’intérêt de développer un modèle plus simple, plus rustique, adapté à un théâtre européen.

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Une ambition exportable : séduire l’Europe

Tuinman n’a pas caché ses ambitions : si le missile hollandais voit le jour, il visera l’export. La Belgique, l’Allemagne, la France, l’Italie ou l’Espagne pourraient être intéressées. Ces pays cherchent tous des munitions longue portée abordables, compatibles OTAN, et disponibles rapidement.

Dans un monde où l’armement devient un produit en tension, être producteur plutôt que client, c’est s’assurer une marge d’action.

Et si ce projet réussit, les Pays-Bas auront franchi un cap stratégique majeur, en s’imposant comme acteur crédible dans le domaine très fermé des missiles de croisière.

Quelques exemples de missiles de croisière longue portée (navals) :

Modèle Pays Portée Vitesse Guidage Lancement Prix estimé
Tomahawk Block V États-Unis 1 600 km 880 km/h GPS, inertiel, TERCOM, DSMAC Silo vertical (Mk 41) ~2 millions €
JSM-SL Norvège (Kongsberg) +300 km Subsonique GPS, INS, IR, RF passif Lance-torpilles sous-marins ~1 million €
Missile NL (projet) Pays-Bas ~500–1 000 km (objectif) Subsonique GPS, inertiel, IR (probable) Modulaire (silo ou navire) ~0,5 à 1 million € (objectif)
MdCN France 1 000 km 880 km/h GPS, INS, IIR Sylver A70, tubes SNLE ~3 millions €

 

Source : https://www.bnr.nl/nieuws/nieuws-politiek/10588012/precisiewapen-van-nederlandse-bodem-moet-binnen-zes-maanden-af-kunnen-zijn

Image : Un destroyer procède au tir d’un missile Tomahawk tactique pour tester sa charge militaire.
Après un vol de 760 milles nautiques, le missile atteint sa cible sur l’île de San Clemente, au large du sud-ouest de la Californie.

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