Un simple cliché satellite a suffi à mettre en alerte les états-majors occidentaux : la Chine aurait lancé la construction de son tout premier porte-avions à propulsion nucléaire, une étape stratégique qui pourrait redessiner la carte de la puissance maritime dans le Pacifique.
Pendant que Pékin communique peu, les images parlent d’elles-mêmes. À Dalian, un chantier discret mais colossal prend forme, avec des indices techniques qui rappellent directement les méthodes américaines. Derrière cette coque en devenir se cache une ambition claire : rivaliser, voire dépasser, la domination navale des États-Unis à l’horizon 2030. Ce projet ne concerne pas seulement un navire. Il touche à la dissuasion, à la logistique nucléaire, à la projection de puissance et à la capacité de la Chine à rester en mer indéfiniment. Une bascule stratégique silencieuse, mais lourde de conséquences.
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Un chantier qui ne trompe plus personne
Les premières alertes sont venues de l’imagerie satellite, un outil devenu central dans l’analyse militaire moderne. À Dalian, dans le nord-est de la Chine, des structures inhabituelles sont apparues sur un site pourtant bien connu : le chantier naval où ont déjà été assemblés les porte-avions Liaoning et Shandong. Cette fois, les dimensions observées dépassent clairement celles des bâtiments précédents. Les analystes ont relevé la mise en place de supports de quille sur plus de 270 mètres, une longueur compatible uniquement avec un très grand navire de type porte-avions lourd. Plus révélateur encore, une coque partielle d’environ 150 mètres de long et 43 mètres de large a été identifiée dans une forme sèche. Ces chiffres ne correspondent ni à un destroyer, ni à un navire amphibie classique. Ce sont surtout deux cadres rectangulaires massifs intégrés à la structure qui ont attiré l’attention. Leur taille évoque directement des compartiments de confinement de réacteurs, un élément absent des porte-avions chinois à propulsion classique.
Le nucléaire naval comme saut technologique
Jusqu’ici, la Chine disposait de porte-avions conventionnels, alimentés par des turbines classiques nécessitant des ravitaillements fréquents. Passer au nucléaire embarqué change radicalement la donne. Un porte-avions nucléaire peut rester en mer pendant des années, limité seulement par l’endurance de son équipage et ses stocks. Cette capacité transforme le navire en base aérienne mobile permanente, capable d’opérer loin de toute infrastructure terrestre. C’est précisément ce qui fait la force des porte-avions américains de classe Nimitz et Ford, auxquels Pékin semble désormais vouloir se mesurer à armes égales. La propulsion nucléaire offre aussi plus de puissance électrique, indispensable pour alimenter des catapultes électromagnétiques, des radars à longue portée et, demain, des armes à énergie dirigée. Ce n’est donc pas seulement un moteur, mais une architecture de combat complète qui est en jeu.
Dalian, miroir assumé des chantiers américains
Les chercheurs japonais ont comparé les images de Dalian avec celles du chantier de Newport News aux États-Unis, seul site capable de construire des porte-avions nucléaires américains. La ressemblance est frappante. Aux mêmes endroits de la coque, on retrouve des cadres de dimensions quasi identiques, correspondant à l’installation des réacteurs. Ce parallèle suggère que la Chine ne se contente plus d’expérimenter. Elle reproduit méthodiquement un modèle éprouvé, en s’appuyant sur des décennies d’observation des standards américains. Ce n’est pas une copie grossière, mais une adaptation industrielle à grande échelle. Cette montée en compétence révèle une maturité industrielle que peu d’observateurs prêtaient à la Chine il y a encore quinze ans. Construire un porte-avions nucléaire n’est pas seulement une prouesse militaire, c’est aussi un test ultime pour toute la chaîne industrielle lourde.

Une base prête à l’accueillir
Un navire de ce type ne peut pas être mis en service sans un écosystème adapté. Là encore, les signaux sont clairs. À Qingdao, base navale stratégique sur la mer Jaune, les infrastructures évoluent rapidement. Des quais sont allongés, des installations de démagnétisation sont construites pour réduire la signature magnétique des navires, un impératif pour les bâtiments nucléaires. À proximité, un nouvel aérodrome naval a vu le jour, avec pistes adaptées à l’entraînement à l’appontage et hangars renforcés. Tout indique une préparation méthodique à l’accueil d’un quatrième porte-avions, bien plus imposant que les précédents. Si Qingdao devient son port d’attache, la Chine renforcerait fortement sa présence vers la mer de Chine orientale et au-delà, étendant sa capacité d’action vers la seconde chaîne d’îles du Pacifique.
Une projection de puissance sans précédent
Un porte-avions nucléaire ne se contente pas de frapper plus loin. Il change le tempo des opérations. Là où un groupe aéronaval classique doit régulièrement se replier pour se ravitailler, une unité nucléaire peut maintenir une pression constante sur une zone pendant des mois. Cette endurance complique considérablement la planification adverse. Elle permet à Pékin de soutenir des opérations aériennes prolongées, de dissuader sans tirer un coup de feu, ou au contraire de frapper rapidement sans dépendre de bases avancées vulnérables. Dans un contexte de tensions autour de Taïwan, de la mer de Chine méridionale ou des routes maritimes stratégiques, ce type de navire devient un outil politique autant que militaire.

Un message clair envoyé aux États-Unis
La Chine sait que la marine américaine reste la référence mondiale. En se dotant d’un porte-avions nucléaire, elle envoie un signal sans ambiguïté : elle entend jouer dans la même catégorie, sur le même terrain, avec les mêmes règles. Ce projet intervient alors que Washington doit gérer le coût colossal de ses propres programmes navals, chaque porte-avions nucléaire dépassant largement les 12 milliards € à la construction, hors groupe d’escorte. Pékin, de son côté, bénéficie de coûts industriels plus faibles et d’une capacité à mobiliser rapidement ses ressources. L’enjeu n’est pas de rattraper immédiatement les États-Unis, mais de réduire l’écart au point de rendre toute confrontation beaucoup plus risquée et imprévisible.
Une course navale qui s’accélère
La mise à l’eau potentielle d’un porte-avions nucléaire chinois au début des années 2030 pourrait marquer un tournant. Elle s’inscrit dans un effort plus large : modernisation des destroyers, sous-marins nucléaires plus discrets, missiles hypersoniques anti-navires et drones de reconnaissance longue portée. Cette accumulation de capacités crée un environnement où la supériorité navale n’est plus acquise, même pour les flottes les plus expérimentées. Le Pacifique devient un espace de plus en plus contesté, où chaque innovation entraîne une contre-mesure. La question n’est donc plus de savoir si la Chine construit un porte-avions nucléaire, mais comment les autres puissances vont s’adapter à cette nouvelle réalité stratégique.
Évolution des porte-avions chinois
| Porte-avions | Propulsion | Année d’entrée en service | Catapultes | Rôle stratégique |
| Liaoning | Classique | 2012 | Non | Formation et démonstration |
| Shandong | Classique | 2019 | Non | Projection régionale |
| Fujian | Classique | 2024 | Oui (EMALS) | Opérations avancées |
| Type 004 (supposé) | Nucléaire | Vers 2032 | Oui | Endurance stratégique |
Source : National Institute for Basic Policy Research