Anti-drones, la France riposte avec sa première vente de son nouveau système SKY WARDEN.
Le groupe européen MBDA (dont le siège social est en France) vient de signer son tout premier contrat d’exportation pour sa solution de lutte anti-drones SKY WARDEN, avec un pays du Moyen-Orient dont le nom n’a pas encore été dévoilé.
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MBDA vend son système SKY WARDEN au Moyen-Orient
Depuis quelques années, les drones se sont multipliés comme des guêpes en été. De la caméra amateur bricolée aux drones tactiques de fabrication iranienne, ces engins volants à bas coût menacent désormais des bases, des convois, des dépôts de munitions, voire des cérémonies militaires. Et ce, dans toutes les guerres modernes : en Ukraine, au Yémen, au Sahel, et même en Israël.
C’est dans ce contexte que MBDA a développé SKY WARDEN, littéralement le « gardien du ciel ». Une solution anti-drones modulaire, évolutive et interopérable, conçue pour répondre à une menace que les radars classiques et les systèmes sol-air lourds peinent à neutraliser efficacement.
Un système primé par l’Union européenne
En novembre 2025 et suite à une compétition de 3 semaines, le système SKY WARDEN a reçu le prix C-UAS décerné par Frontex, l’agence européenne des garde-frontières et des garde-côtes. Une distinction qui n’est pas anecdotique. Elle récompense le meilleur système européen de protection contre les menaces aériennes légères, notamment les micro-drones, qui sont les plus difficiles à repérer.
SKY WARDEN peut détecter, identifier, classer et neutraliser des drones dans un rayon de 8 kilomètres, qu’ils soient isolés ou en essaim. Et ce, qu’ils mesurent 20 centimètres ou qu’ils soient gros comme un scooter.
Une combinaison de capteurs et d’armes au choix
Le secret de SKY WARDEN ? Une architecture ouverte et modulaire. Autrement dit, le client choisit ce qu’il veut intégrer en fonction de ses besoins et de son budget. Chaque brique du système : capteur, radar, système de brouillage, missile, lase, peut être changée, ajoutée ou retirée comme dans un jeu de Lego militaire.
Parmi les composants proposés :
- Un système de commandement C2 (Command and Control) multicapteurs, capable de fusionner les informations de plusieurs sources (radars, caméras, senseurs acoustiques) pour repérer et traquer une menace.
- Des brouilleurs électroniques, capables d’interférer avec le GPS ou les communications du drone pour le faire chuter.
- Le missile MISTRAL 3, un engin léger à guidage infrarouge au taux de réussite supérieur à 96 % contre les cibles aériennes lentes.
- Le laser HELMA-P de CILAS, un canon silencieux qui peut carboniser un drone en plein vol sans bruit ni explosion.
- Le système HTK (Hit-to-Kill) : une munition cinétique qui percute le drone sans ogive explosive, comme une fléchette ultra-précise.
Fiche technique synthétique : SKY WARDEN
| Composant | Description |
|---|---|
| Rayon d’action | Jusqu’à 8 km selon le capteur et l’effecteur |
| Types de cibles | Micro-drones, drones tactiques, essaims |
| Détection | Multicapteurs (radar, optique, acoustique, RF) |
| Commandement | Système C2 modulaire, IA intégrée |
| Effecteurs | Brouilleurs, laser HELMA-P, Mistral 3, HTK |
| Mobilité | Fixe ou mobile, version embarquée possible |
| Interopérabilité | Connectable à des systèmes comme VL MICA / CAMM-ER |
Fixe, mobile, embarqué : le système s’adapte à tout
Autre point fort : la polyvalence d’usage. SKY WARDEN peut être :
- Débarqué, pour protéger un site sensible comme une centrale électrique, un camp militaire, un aéroport.
- Embarqué sur un véhicule, pour escorter des convois ou protéger une colonne en mouvement.
- Intégré à une défense aérienne existante, comme le VL MICA ou le CAMM-ER, pour créer un bouclier multicouche.
Ce niveau de souplesse est rare. Il permet à un pays client d’adapter sa stratégie sans dépendre d’un seul mode opératoire ou d’un fabricant unique. Et c’est probablement ce qui a séduit le premier acquéreur du Moyen-Orient.
Une brique technologique en perpétuelle évolution
L’un des points mis en avant par MBDA est la capacité d’évolution constante de SKY WARDEN. Le système n’est pas figé dans le temps. De nouveaux effecteurs peuvent y être intégrés au fil des années, à mesure que les menaces évoluent.
Le laser HELMA-P, par exemple, a été intégré après le développement initial du système. MBDA a d’ailleurs racheté CILAS pour mieux maîtriser cette technologie de rupture.
Grâce à l’intelligence artificielle embarquée dans le système de commandement, SKY WARDEN est aussi capable d’apprendre des menaces rencontrées, d’enrichir sa base de signatures, et de réagir plus vite en cas de nouvelle attaque.
Une concurrence féroce pour un marché en explosion
MBDA n’est pas seul sur le créneau. Loin de là. Face à l’explosion du marché de la lutte anti-drones (C-UAS pour « Counter-Unmanned Aerial Systems »), plusieurs acteurs internationaux se disputent les parts du gâteau. Selon les dernières estimations du cabinet Markets and Markets, le marché mondial des systèmes C-UAS pourrait atteindre plus de 10 milliards d’euros d’ici 2030, contre moins de 2 milliards aujourd’hui.
Parmi les concurrents directs de SKY WARDEN, on retrouve :
- Rafael (Israël) avec son système Drone Dome, une solution compacte très déployée au Moyen-Orient, notamment en Arabie Saoudite.
- Lockheed Martin (États-Unis) avec des modules C-UAS intégrés à l’écosystème de défense aérienne intégré de l’US Army, dont les tests sont en cours en Europe de l’Est.
- Northrop Grumman et son SHiELD (Self-Protect High Energy Laser Demonstrator), encore en phase d’expérimentation.
- Diehl Defence (Allemagne), avec des solutions hybrides intégrant des brouilleurs, des radars à balayage électronique et des munitions airburst.
- Thales, qui propose la solution C-UAS HORUS, plus légère et adaptée aux environnements urbains ou déployables sur les bases projetées.
- Leonardo, qui développe des plateformes combinant radar et systèmes d’interception, notamment pour la marine italienne.
Ce marché est hautement concurrentiel, mais très fragmenté. La plupart des systèmes se concentrent sur une seule brique (detection, neutralisation, brouillage, etc.) tandis que SKY WARDEN propose une approche intégrée et évolutive, un argument fort pour séduire les pays qui n’ont ni doctrine structurée, ni parc existant à intégrer.
À noter également : le recours croissant à l’intelligence artificielle, aux radars passifs et aux capteurs distribués transforme ces systèmes en véritables petits centres de commandement tactique. Un enjeu qui dépasse largement la simple neutralisation d’un drone.
SKY WARDEN face à ses rivaux :
| Système | Pays | Type de neutralisation | Statut | Particularité |
|---|---|---|---|---|
| SKY WARDEN | France / MBDA | Brouillage, laser, missile, hit-to-kill | Opérationnel, exporté | Architecture modulaire et interopérable |
| Drone Dome | Israël / Rafael | Brouillage, laser | Opérationnel, en service en Arabie Saoudite | Excellente compacité et mobilité |
| SHiELD | États-Unis / Northrop | Laser haute énergie | En test | Monté sur avion de combat |
| HORUS | France / Thales | Brouillage, drone-intercepteur | Déploiement limité | Léger, adapté aux bases avancées |
| Leonardo C-UAS | Italie / Leonardo | Radar, brouillage, interception | En développement | Spécialisation marine et urbaine |
| Diehl C-UAS | Allemagne / Diehl Defence | Brouillage, munitions airburst | Opérationnel partiel | Intégration avec radars multifonctions |
La France et l’Europe dans le « jeu de la lutte anti-drones »
Ce contrat signé au Moyen-Orient ne vaut pas seulement pour sa valeur industrielle. Il montre l’entrée de la France et de l’Europe dans un marché dominé jusqu’à présent par des solutions américaines ou israéliennes, comme Iron Dome ou Drone Dome.
Il traduit aussi une évolution des rapports de force. Aujourd’hui, un pays qui veut protéger ses frontières, ses raffineries, ses stades ou ses convois n’a pas besoin de chars lourds ni de chasseurs furtifs. Il lui faut des capteurs, de l’électronique, des opérateurs formés et des solutions souples. Exactement ce que SKY WARDEN promet.
L’armée française elle-même n’a pas encore officialisé son choix, mais le système fait partie des candidats surveillés de très près pour la future bulle anti-drones française, aux côtés de solutions comme MILAD, PARADE ou BASSALT.
Source : Communiqué de presse de MBDA