Le retour du roi ? La Thaïlande relance son porte-avions avec l’aide de Thales.
Il avait été surnommé « le yacht royal » pour son utilisation symbolique et son pont déserté par les avions. Le HTMS Chakri Naruebet, unique porte-avions d’Asie du Sud-Est, sort de sa semi-retraite. Et c’est la France qui lui va redonner une seconde jeunesse !
Thales vient de signer un contrat majeur pour y installer un système de gestion intégré ultra-moderne. Une résurrection technologique… et politique.
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Le HTMS Chakri Naruebet, une plateforme vieille de 28 ans mais qui peut encore être utile
Mis en service en 1997, le Chakri Naruebet avait tout de « l’éléphant blanc » de la flotte thaïlandaise (un projet très coûteux mais inutile). Construit sur le modèle espagnol du Príncipe de Asturias, il faisait bonne figure dans les parades, les missions humanitaires ou les entraînements conjoints mais faute d’avions embarqués réellement opérationnels depuis plus de 20 ans, le navire semblait destiné à une lente obsolescence.
C’est justement ce que veut éviter la marine thaïlandaise en modernisant le cœur du système du navire : sa gestion interne. Le contrat signé à l’occasion du salon Defense & Security 2025 prévoit l’installation d’un Integrated Platform Management System (IPMS) par Thales et son partenaire local UCS (Universal Communication Systems Co. Ltd.).
Un cerveau numérique pour piloter les entrailles du navire
L’IPMS est en quelque sorte un tableau de bord intelligent destiné aux bâtiments de guerre. Il centralise le contrôle de la propulsion, des systèmes électriques, des auxiliaires, de la sécurité incendie et de la gestion des avaries. Il va même plus loin : il connecte en temps réel ces fonctions techniques aux systèmes de combat et de navigation.
Autrement dit, en cas de problème moteur ou de fuite à bord, le système pourra proposer des réactions automatiques, des mesures d’isolement et des priorités d’intervention. Et surtout : il allège la charge cognitive des marins, ce qui est vital dans un contexte de réduction des équipages et de montée en complexité opérationnelle.
Un symbole pour la Thaïlande, un pied dans l’industrie navale moderne
Ce projet, c’est aussi un message envoyé aux voisins : la Thaïlande ne renonce pas à sa stature navale. Même si le Chakri Naruebet ne rivalise pas avec les porte-avions chinois ou indiens, il peut redevenir une plateforme crédible pour les patrouilles, les secours maritimes et les exercices multinationaux.
Derrière cette modernisation, il y a toute une stratégie industrielle. Thales ne travaillera pas seul. L’intégration locale avec UCS permettra à la Thaïlande de développer ses propres compétences en maintien en condition opérationnelle, ce qui évite de dépendre à long terme de techniciens étrangers. Un point essentiel à l’heure où l’autonomie stratégique revient en force.
Thales, un partenaire déjà bien installé
Ce contrat n’est pas un coup d’essai pour Thales. Plus de 80 % des bâtiments de la marine royale thaïlandaise utilisent déjà des équipements fournis par le groupe français : radars, sonars, systèmes de lutte contre les mines, réseaux de commandement, etc.
C’est la première fois qu’un système IPMS de cette ampleur sera installé sur un navire thaïlandais, mais il s’inscrit dans une relation de plus de 50 ans entre les deux parties. Ce partenariat dépasse la simple fourniture d’équipement : il touche aussi à la formation, la simulation et la maintenance locale.
Un contexte régional tendu, une flotte à réorganiser
La remise à niveau du Chakri Naruebet intervient dans un contexte de modernisation accélérée dans toute l’Asie du Sud-Est. La Chine multiplie les navires de guerre en mer de Chine méridionale, le Vietnam renforce sa flotte, et l’Indonésie développe ses capacités côtières. Pour la Thaïlande, ne pas suivre reviendrait à se marginaliser.
Ce porte-avions rénové pourrait donc jouer un rôle accru dans la logistique, les opérations humanitaires post-catastrophes, les missions de présence et les partenariats navals régionaux. Et pourquoi pas, à terme, redevenir un véritable bâtiment aéronaval si de nouveaux drones ou avions légers embarqués venaient compléter l’ensemble.
Récapitulatif des forces de la Royal Thaï Navy
| Catégorie | Nom / Classe | Nombre | Fonction principale | Remarques |
|---|---|---|---|---|
| Porte-avions léger | HTMS Chakri Naruebet | 1 | Projection, soutien, opérations aéronavales | Modernisation IPMS en cours avec Thales |
| Frégates | Classe Naresuan | 2 | Lutte anti-navire et anti-aérienne | Co-construction avec la Chine, modernisées |
| Classe Chao Phraya | 4 | Patrouille et protection maritime | Conçues d’après les Type 053 chinoises | |
| Corvettes | Classe Ratanakosin | 2 | Surveillance côtière et escorte | En service depuis les années 1980 |
| Patrouilleurs lance-missiles | Classe Sattahip / Pattani | 15+ | Contrôle maritime, police des eaux | Modules armés parfois limités |
| Navires amphibies | HTMS Angthong | 1 | Débarquement, aide humanitaire | Construit à Singapour, classe Endurance |
| Navires de débarquement divers | ~7 | Transport de troupes, logistique | Inclut ex-classes américaines | |
| Sous-marins | Classe S26T (chinois) | 1 (commandé) | Lutte sous-marine, dissuasion | Construction ralentie, livraison prévue après 2026 |
| Aéronavale | AV-8S Matador / Harrier | 0 | Appui aérien embarqué | Retirés du service ; pas remplacés |
| Hélicoptères S-70B / UH-60 | 6+ | Lutte ASM, transport, SAR | Opèrent depuis frégates ou le porte-avions |
Source : Thales
Image : Le navire de la marine royale thaïlandaise HTMS CHAKRINARUEBET (CVH 911) en mer de Chine méridionale.