Le Japon sort de l’ombre : le missile hypersonique qui inquiète Pékin et Pyongyang.
Le 8 juin 2025, au pied du mont Fuji, un grondement singulier va secouer le sol. Ce ne sera pas celui d’un volcan, mais celui d’un projectile glissant à plus de 6 000 km/h. Le Japon, longtemps discret sur le plan militaire, dévoilera alors un engin au potentiel dévastateur : le HVGP (pour Hyper Velocity Gliding Projectile, soit dans une langue un peu moins barbare « projectile glissant hyper véloce »). Un missile hypersonique monté sur lanceur mobile, pensé pour frapper avec précision, loin, vite, et sans se faire intercepter. Ce moment, soigneusement orchestré par les forces d’autodéfense japonaises, marque un tournant dans la posture stratégique du pays.
Pendant des décennies, Tokyo s’était interdit la moindre velléité offensive. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas. Entre l’ombre de Pékin et la menace permanente de Pyongyang, l’archipel affirme qu’il est prêt. À dissuader, à prévenir, voire à agir.
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Le HVGP :, une vitrine technologique sur fond de tension régionale pour le Japon
L’exercice annuel Fuji Firepower n’a jamais été un simple défilé militaire. Il est devenu au fil du temps un laboratoire à ciel ouvert, où les innovations défensives se testent, se rôdent, se montrent. L’édition 2025 s’annonce exceptionnelle : pour la première fois, le missile hypersonique japonais HVGP y sera tiré en démonstration publique. Ce projectile de nouvelle génération, conçu pour franchir 900 kilomètres en quelques minutes, suit une trajectoire planante, imprévisible, et surtout difficile à intercepter.
Ce missile n’est pas seul. À ses côtés, deux véhicules blindés issus de la série Type 24 seront également dévoilés : un mortier autopropulsé et un véhicule de reconnaissance de nouvelle génération. Ces engins, conçus pour des opérations insulaires, traduisent un recentrage doctrinal clair : protéger les îles les plus éloignées, comme celles de l’archipel Nansei, à portée directe de la Chine.
Le message adressé est limpide : le Japon n’attend plus d’être attaqué pour se préparer.
Le HVGP : une menace glissante à Mach 5
Le Hyper Velocity Gliding Projectile, ou HVGP, est un missile développé par Mitsubishi Heavy Industries. Il repose sur une technologie complexe : une charge propulsée à très haute vitesse, qui quitte son lanceur terrestre, atteint la haute atmosphère, puis plane en hypersonique vers sa cible. La vitesse dépasse Mach 5, soit plus de 6 100 km/h. L’effet recherché est double : frapper rapidement et éviter les systèmes de défense antimissile adverses.
Le missile est monté sur une plateforme mobile au sol. Cette mobilité permet de le dissimuler, de le déplacer rapidement, et de rendre sa détection plus difficile. Son système de guidage combine navigation inertielle et satellite (GNSS), ce qui permet des frappes précises, même dans des environnements électromagnétiques brouillés.
Deux versions sont prévues :
Bloc | Longueur | Portée estimée | Déploiement |
---|---|---|---|
Bloc 1 | 8 à 9 mètres | 900 km | 2026 |
Bloc 2 | Plus de 10 mètres | Plus de 3 000 km | Non précisé |
L’objectif est clair : protéger les points névralgiques, comme Kyushu et Hokkaido, contre des incursions, des débarquements ou des frappes adverses.
Des blindés conçus pour les îles
L’exercice verra également la présentation du nouveau Type 24, un véhicule blindé multifonction conçu pour la projection rapide sur des terrains escarpés ou peu accessibles. Deux versions seront exposées : le Type 24 Mobile Mortar et le Type 24 Reconnaissance Combat Vehicle.
Le Type 24 MM est équipé d’un mortier Thales 2R2M de 120 mm intégré dans une tourelle semi-automatisée. Il permet une mise en batterie rapide et une capacité de tir « shoot-and-scoot », idéale pour des feux indirects sur un théâtre insulaire.
Le Type 24 RCV, quant à lui, possède une tourelle habitée armée d’un canon Bushmaster Mk44 de 30 mm et d’une mitrailleuse coaxiale de 7,62 mm. Il est également équipé de capteurs électro-optiques de dernière génération, capables de repérer une cible à plusieurs kilomètres, de jour comme de nuit.
Ces deux véhicules reprennent le châssis du Type 16, déjà utilisé par les unités de déploiement rapide. Leur conception vise un compromis entre puissance de feu, rapidité et adaptation aux zones littorales.
Une armée qui s’adapte au multi théâtre d’opérations
Le Japon est entouré de défis. Des incursions aériennes quotidiennes chinoises au large de l’archipel, des tirs de missiles balistiques nord-coréens, une Russie de plus en plus imprévisible au nord. Cette pression constante pousse les forces japonaises à moderniser leur posture.
L’exercice Fuji Firepower 2025 ne sera pas qu’un spectacle pour caméras. Il servira aussi de banc d’essai pour l’interopérabilité entre systèmes, la coordination air-sol-mer, et la gestion tactique en conditions réalistes. Le commandement japonais souhaite tester la réaction de ses unités dans un scénario où plusieurs domaines sont simultanément engagés : terre, air, mer et cyberespace.
Ce glissement vers des scénarios de guerre hybride s’inscrit dans une transformation doctrinale. Le Japon ne se limite plus à une posture de dissuasion. Il affirme sa capacité à mener une réponse offensive si nécessaire.
Une alliance militaire renforcée
Derrière les missiles et les blindés, une constante demeure : le lien avec Washington. Les États-Unis sont étroitement associés au programme HVGP, notamment à travers des transferts de technologies, des exercices conjoints et des systèmes de commandement partagés.
Cette coopération s’intensifie. Le Japon prévoit d’augmenter son budget de défense pour atteindre l’équivalent de 2 % de son produit intérieur brut, soit près de 90 milliards d’euros par an. Un budget qui le placerait parmi les cinq premières puissances militaires du monde, à égalité avec l’Inde et la Russie.
Le contexte géopolitique tendu dans l’Indo-Pacifique renforce cette dynamique. Washington compte sur Tokyo comme pilier de la stabilité régionale, notamment face à l’ascension maritime de la Chine et aux ambitions balistiques de la Corée du Nord.
Une stratégie de dissuasion offensive
Le HVGP et les véhicules Type 24 sont les premiers témoins visibles d’un virage militaire assumé. Longtemps cantonné à un rôle de protection territoriale, le Japon se dote désormais d’armes conçues pour projeter de la puissance à distance, avec rapidité et précision.
Ce n’est pas un hasard si les premières unités à recevoir le HVGP seront déployées dans les zones les plus exposées : les îles Nansei, à quelques centaines de kilomètres de Taïwan, ou Hokkaido, en ligne directe avec la Russie. Il s’agit de points de friction où la moindre provocation pourrait dégénérer.
Avec le HVGP, Tokyo annonce qu’elle pourra frapper un navire ennemi à 900 kilomètres en moins de 6 minutes. Le tout depuis un camion qui pourrait être dissimulé dans une forêt, un tunnel ou un entrepôt.
Il ne s’agit plus seulement de se défendre. Il s’agit d’anticiper. D’agir avant que la menace ne touche terre. Le Japon, puissance industrielle et technologique, se redessine aussi comme une puissance stratégique. Le feu qui jaillira du mont Fuji en juin ne sera pas volcanique. Il sera hypersonique.
Source : Telegram Channel @軍事日本