Derrière les contrats de nouveaux hélicoptères militaires, c’est une ambition plus large qui se dessine pour Rabat : renforcer sa présence en mer et combler une faiblesse stratégique majeure.
Avec plus de 3 500 km de côtes et des tensions régionales croissantes, le Maroc veut se donner les moyens de répondre à tous les scénarios. Les discussions restent discrètes, mais les offres affluent : France, Allemagne, Russie, Brésil ou encore Grèce. Le choix de Rabat pourrait transformer la carte militaire en Méditerranée occidentale. Si tout se concrétise, le Maroc pourrait devenir le deuxième pays d’Afrique du Nord à posséder une force sous-marine, aux côtés de son rival historique, l’Algérie.
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Une surveillance maritime sous pression
Avec 3 500 km de littoral à surveiller et une zone maritime économique de plus de 278 000 km², le Maroc fait face à un véritable casse-tête de sécurité en mer. Jusqu’à présent, la stratégie repose sur une combinaison de frégates et de patrouilleurs. Mais sans capacité sous-marine, une partie des menaces reste invisible. Surtout que l’Algérie, avec huit sous-marins russes, garde un avantage net dans ce domaine, dont certains basés à moins de 150 km des eaux marocaines.
Des Scorpène taillés pour Rabat
Côté français, Naval Group pousse ses célèbres Scorpène, déjà en service au Chili, au Brésil et en Inde. Ce sont des sous-marins diesel-électriques furtifs, taillés pour les missions de renseignement, de défense côtière et d’attaque. Ils peuvent emporter jusqu’à 18 armes : torpilles, missiles, mines. Cerise sur le gâteau : la France propose de monter une chaîne de production à Casablanca, avec transfert de savoir-faire local. Une promesse qui pourrait peser lourd dans la balance.
L’expérience allemande comme alternative
De son côté, l’Allemagne propose deux modèles via TKMS : le Dolphin AIP (avec 2 050 tonnes et propulsion à piles à combustible pour rester des semaines sous l’eau) et le HDW 209/1400mod, plus ancien, mais largement éprouvé. Ces modèles misent sur une technologie discrète, un haut degré de fiabilité, et un rapport qualité-prix attractif, un argument de poids alors que Rabat garde un œil attentif sur ses finances.
Des options à double tranchant
Le Maroc explore aussi d’autres pistes. La Russie relance une vieille proposition avec son Amur 1650, un modèle resté à moitié construit depuis 2005. Le Brésil ou la Grèce proposent quant à eux des sous-marins d’occasion de type allemand. Moins chers, certes, mais aussi plus risqués en matière de maintenance, de performances ou de compatibilité avec les autres équipements marocains. Rabat devra peser chaque compromis.
Des hélicoptères pour accompagner le virage naval
Déjà, le Maroc a franchi une étape avec la commande de 10 H225M Caracal à Airbus, signée le 1er septembre 2025. Ces hélicoptères modernes peuvent couvrir 1 200 km, se ravitailler en vol, et participer à des missions spéciales, de jour comme de nuit. Ils remplaceront une flotte vieillissante composée de Puma, Huey, Bell 212 et Chinook, dont certains ont plus de 40 ans de service. Le royaume devient ainsi le premier opérateur africain de ce modèle.
Une marine bien équipée mais incomplète
Avec 121 bâtiments, dont 6 frégates, 1 corvette et 18 patrouilleurs de haute mer, la marine marocaine est moderne, mais il lui manque une capacité clé : la furtivité sous-marine. Pour assurer une veille permanente, les experts estiment qu’il faudrait au moins 2 à 3 sous-marins, capables de se relayer pendant que les autres sont à quai pour maintenance ou entraînement. Un format qui permettrait à Rabat de tenir la mer en continu.
Une vision à long terme pour l’indépendance militaire
Au-delà de ces achats, c’est un changement profond de doctrine qui se profile. Le Maroc veut bâtir une armée intégrée, reliant mer, air, terre et cyber. Son budget défense 2025 atteint 13 milliards d’euros, financé en partie par les marchés internationaux. Rabat veut aussi produire localement : munitions, blindés, drones navals, tout en misant sur l’autonomie stratégique. Une ambition assumée pour peser sur la scène régionale sans dépendre éternellement des grands fournisseurs.
Source : H24info