Un nouveau missile balistique pourrait redessiner les stratégies militaires de la France et de l’Europe. Doté d’une portée de plus de 2 000 km, il offrirait une capacité de frappe conventionnelle sans recours au nucléaire, tout en restant quasi impossible à intercepter.
La France planche sur le développement d’un missile balistique terrestre à longue portée, capable de frapper des cibles à plus de 2 000 km. Ce projet stratégique vise à renforcer sa capacité de dissuasion non-nucléaire, tout en plaçant l’Europe au niveau des grandes puissances. Inspiré par les leçons du conflit ukrainien, ce programme pourrait voir le jour d’ici 2035.
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Une riposte aux nouvelles menaces
Face à un environnement géopolitique instable, Paris souhaite disposer d’une capacité autonome de frappe à longue portée. Le choix du balistique s’est imposé après les enseignements tirés de la guerre en Ukraine, où les missiles de croisière se sont révélés trop vulnérables face à des systèmes de défense modernes. Un missile balistique, capable de monter en altitude avant de piquer vers sa cible à plus de 2 000 km, est bien plus difficile à intercepter. La France envisage donc un système comparable, mais avec une charge strictement conventionnelle, pour ne pas franchir le seuil nucléaire.
Une portée qui change la donne européenne
Ce futur missile pourrait atteindre des cibles situées au-delà de la mer Noire, voire jusqu’à la frontière caucasienne. Une telle portée, supérieure à 2 000 km, repositionnerait la France en tête des puissances militaires de l’Union européenne. Elle est aujourd’hui la seule à posséder une chaîne complète de production de missiles, notamment les M51 embarqués sur sous-marins. Ce nouveau vecteur permettrait de mutualiser des technologies déjà maîtrisées par ArianeGroup ou MBDA, tout en répondant aux besoins de l’OTAN.
Des alliances industrielles décisives
Le développement de ce programme pourrait être confié à deux acteurs clés : ArianeGroup (Airbus + Safran) et MBDA, le spécialiste européen des missiles. Les deux entreprises disposent d’un savoir-faire unique, tant en propulsion qu’en systèmes de guidage. ArianeGroup fabrique déjà les missiles M51 à bord des sous-marins nucléaires, tandis que MBDA est à l’origine de la plupart des missiles sol-air et air-sol utilisés par les forces européennes. Une coopération franco-européenne sur ce projet serait un signal fort pour l’autonomie stratégique du continent.
Une doctrine non-nucléaire assumée
Contrairement aux systèmes tactiques américains ou russes qui peuvent embarquer des charges nucléaires ou conventionnelles, la France souhaite ici créer une arme de frappe préventive non-nucléaire. Cette posture vise à éviter les escalades tout en conservant un fort pouvoir de dissuasion. Ce missile pourrait être opérationnel en moins de 10 minutes et neutraliser des objectifs stratégiques avant même que l’adversaire ne riposte. Une vitesse supersonique, couplée à une trajectoire imprévisible, rend son interception quasi impossible.
Un calendrier qui s’accélère
Ce projet a été présenté dès 2024 à l’Assemblée nationale avec une première portée de 1 000 km. L’objectif a depuis été doublé pour atteindre 2 000 km, avec une entrée en service envisagée à partir de 2035. Voici les jalons clés à retenir :
Date | Événement |
2024 | Présentation à l’Assemblée nationale |
2025-2027 | Définition des spécifications et prototypage |
2028-2030 | Développement industriel et premiers essais |
2031-2035 | Livraison et mise en service |
Vers une projection au-delà des frontières
Le missile pourrait être déployé hors du territoire national, sur des bases alliées ou dans des zones stratégiques proches de l’arc méditerranéen. Cette mobilité permettrait une riposte rapide en cas de crise. La France cherche ainsi à renforcer son rôle de puissance régionale, tout en complétant la dissuasion nucléaire actuelle. Le missile pourrait être embarqué sur des camions lourds ou des systèmes mobiles pour éviter toute vulnérabilité.
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Une Europe stratégique en gestation
Ce programme s’intègre dans une vision plus large appelée ELSA (European Long-Range Strike Approach), visant à mutualiser les efforts technologiques. L’objectif : créer une capacité de frappe européenne indépendante des États-Unis. Si l’initiative prend forme, elle pourrait servir de base à une future force de dissuasion européenne, fondée sur des moyens conventionnels, rapides, et réversibles. Une manière de répondre aux nouvelles menaces sans sombrer dans la prolifération.
Source : Assemblée nationale