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La France prend tout le monde de court : cette arme sous-estimée va combler une faille que même l’OTAN ne savait plus gérer

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Said LARIBI

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En pleine impasse capacitaire sur l’artillerie de longue portée, Paris jette un œil appuyé à l’Inde pour rattraper son retard. Le lance-roquettes Pinaka, produit en série, testé au feu et …

La France prend tout le monde de court : cette arme sous-estimée va combler une faille que même l’OTAN ne savait plus gérer

En pleine impasse capacitaire sur l’artillerie de longue portée, Paris jette un œil appuyé à l’Inde pour rattraper son retard. Le lance-roquettes Pinaka, produit en série, testé au feu et à bas coût, pourrait bien combler un trou stratégique que l’industrie française n’a pas su anticiper.

Depuis plusieurs mois, les regards se tournent vers New Delhi. La France, habituellement fournisseur de technologies militaires, se retrouve cette fois du côté de la demande, en quête d’un système déjà opérationnel pour ne pas laisser ses régiments d’artillerie dans l’impasse. Le système Pinaka, conçu par l’Inde, séduit par sa portée, son agilité et surtout sa disponibilité immédiate. En coulisses, l’État-major français s’agite : le choix d’un système étranger marquerait un tournant stratégique.

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Un intérêt assumé au plus haut niveau

Le chef d’état-major de l’armée de Terre, le général Pierre Schill, n’a pas caché son intérêt lors de son déplacement à New Delhi en octobre 2025. À huis clos, mais relayé par The Economic Times, le général a affirmé être “très attentif aux capacités indiennes de longue portée”. Ce n’est plus une rumeur : la France évalue activement le système Pinaka, un lance-roquettes multiple conçu par l’Inde pour sa propre armée. Le choix du Pinaka serait une rupture dans la doctrine française. Jusqu’ici, la France s’appuyait sur son savoir-faire souverain, avec des canons Caesar ou des projets comme le FLP-T, présenté comme un HIMARS hexagonal. Mais la lenteur du calendrier et l’obsolescence des stocks actuels forcent Paris à envisager des solutions extérieures. L’idée d’un partenariat avec l’Inde n’est donc plus un tabou, mais une option réaliste dans une période où la rapidité d’acquisitionprime sur la pure autonomie industrielle.

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Un lanceur aux performances éprouvées

Le Pinaka Mk2 repose sur une batterie montée sur camion, armée de 12 roquettes de calibre 214 mm, capables de frapper entre 60 et 75 km selon la version. Mieux encore, une version en développement promet jusqu’à 120 km, et un dérivé balistique pourrait atteindre 300 km, rivalisant ainsi avec les missiles tactiques occidentaux. Le système intègre un pilotage inertiel et satellitaire pour ses roquettes, un calculateur de tir numérique et un mécanisme hydraulique de stabilisation qui permet un déploiement express sur terrain irrégulier. Grâce à ses modules de rechargement rapides, il peut tirer puis se replier en moins de deux minutes, évitant ainsi toute détection par les radars de contre-batterie. Ces caractéristiques font du Pinaka un outil hautement mobile, idéal pour des combats modernes où la survie dépend de la vitesse d’exécution.

Un trou capacitaire inquiétant en France

Côté français, la situation est préoccupante. Le système LRU (Lance-Roquettes Unitaire), dérivé du MLRS américain, arrive en fin de vie. D’ici 2027, il n’en restera quasiment plus dans les unités d’artillerie. En parallèle, le programme FLP-T, censé assurer la relève, ne tirera pas avant 2026 et ne sera pleinement opérationnel qu’à l’horizon 2028-2030. Cela laisse un vide de plusieurs années pendant lequel la France ne disposera d’aucune capacité de frappe au-delà de 40 km depuis le sol. Dans un contexte de réarmement global, cette absence est jugée intenable par les experts militaires. Le Pinaka apparaît dès lors comme une solution de transition, capable d’assurer une puissance de feu immédiate tout en laissant le temps à Nexter et à ses partenaires de finaliser leur propre système.

Le chef de l'armée indienne, le général Upendra Dwivedi, avec son homologue français, le général Pierre Schill (à droite)
Le chef de l’armée indienne, le général Upendra Dwivedi, avec son homologue français, le général Pierre Schill (à droite)

Une réponse à l’urgence stratégique européenne

L’invasion russe de l’Ukraine a remis l’artillerie au centre du champ de bataille. Dans un conflit de haute intensité, la supériorité ne se joue plus seulement dans les airs, mais aussi sur la capacité à frapper vite et loin. Le Pinaka répond précisément à ce besoin : sa cadence de tir permet de délivrer une salve complète en 44 secondes, saturant une zone cible avant toute riposte adverse. Les simulations menées par l’armée indienne montrent que le système peut neutraliser des centres de commandement, des positions antiaériennes ou des colonnes logistiques à plusieurs dizaines de kilomètres. Pour l’armée française, dont les théâtres d’opérations s’étendent du Sahel à l’Europe de l’Est, cette vitesse d’engagement et cette portée accrueconstituent des atouts déterminants dans des scénarios de défense collective.

Un choix pragmatique, pas une trahison industrielle

Certains voient dans cette approche un renoncement à la souveraineté technologique française. En réalité, c’est une décision de bon sens. L’achat d’un système étranger déjà éprouvé ne signifie pas l’abandon de la filière nationale, mais une mesure d’urgence tactique. Le Pinaka pourrait être utilisé comme un “pont technologique”, le temps que le FLP-T français atteigne sa maturité opérationnelle. Des précédents existent. La France a déjà acheté des drones américains Reaper avant de lancer ses propres programmes, ou encore des radars espagnols pour combler des retards. Le but n’est pas d’importer durablement, mais de maintenir la crédibilité militaire immédiate. En somme, le Pinaka serait un instrument temporaire au service d’une stratégie pérenne : garder une force de frappe prête à l’emploi.

Le Pinaka Mk2 indien (Source : Armée indienne)
Le Pinaka Mk2 indien (Source : Armée indienne)

Un signal fort à l’Inde et à l’OTAN

Cette ouverture vers New Delhi serait également un geste politique. Pour l’Inde, c’est la reconnaissance d’un acteur technologique crédible, désormais capable d’exporter des systèmes de niveau OTAN. Pour la France, c’est la démonstration d’une agilité stratégique, capable de contourner les lourdeurs industrielles au profit de l’efficacité opérationnelle. Au sein de l’OTAN, Paris enverrait aussi un signal fort : la diversification des fournisseurs devient une priorité face aux risques de pénurie. En adoptant un matériel indien, la France prouverait qu’elle sait adapter sa doctrine d’acquisition à la réalité du terrain, sans attendre que les procédures ou les égos industriels se débloquent.

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Vers une coopération plus large

Les discussions en cours entre les deux pays ne se limitent pas aux roquettes. Paris évalue également les munitions rôdeuses, les kits anti-drones et les systèmes de guerre électronique développés par l’industrie indienne. Cette synergie pourrait préfigurer une coopération technologique élargie, où la France et l’Inde codévelopperaient certains composants, notamment dans le domaine des capteurs et de la navigation. Les experts évoquent déjà une possible adaptation du Pinaka aux standards français de communication et à l’écosystème numérique du système d’artillerie Caesar, pour garantir une intégration fluide sur le terrain. L’objectif n’est pas seulement d’importer, mais d’échanger des savoir-faire entre deux nations qui partagent de plus en plus de convergences stratégiques.

Calendrier estimé des décisions françaises autour du Pinaka

Étape Date estimée Détail
Déclaration d’intérêt public Octobre 2025 Lors de la visite à New Delhi
Évaluation technique du système Novembre-décembre 2025 Par la DGA et l’armée de Terre
Décision d’achat (lot initial) T1 2026 Possiblement une batterie de test
Livraison initiale Fin 2026 Si décision rapide confirmée
Coopération industrielle potentielle 2027-2028 Codéveloppement ou production locale

 

Source : The Economic Times

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