Opérations extérieures : la France muscle son jeu sur tous les fronts.
Du 2 au 9 octobre 2025, les armées françaises ont multiplié les engagements sur cinq théâtres d’opérations majeurs : Europe, Proche-Orient, Afrique, Indo-Pacifique et Antilles. Derrière les exercices interalliés, les patrouilles maritimes ou les formations tactiques, c’est une stratégie claire qui se dessine : maintenir la pression, renforcer l’interopérabilité, et défendre les intérêts français dans un contexte géopolitique de plus en plus tendu.
Lire aussi :
- Détails sur la mission aux 700 soldats français face à la frontière la plus explosive du Moyen-Orient
- Les 8000 membres de « l’équipe de France » de l’espionnage militaire reçoivent un hommage rare de la part du chef d’état-major des armées Fabien Mandon
Où en est la France dans ses déploiements militaires à l’étranger ?
À Albacete, en Espagne, le Flying Course 25-3 du TLP (Tactical Leadership Programme) de l’OTAN s’est achevé le 3 octobre. Huit Rafale et un AWACS E3F français ont participé à cet exercice de haut niveau, mobilisant 184 militaires. Vingt-deux officiers français en sortent qualifiés comme chefs de mission, aptes à diriger des opérations aériennes complexes réunissant jusqu’à 50 appareils multinationaux. Objectif : faire parler un langage commun à toute l’Alliance.
Plus à l’Est, en Estonie, la compagnie d’infanterie légère française poursuit sa coopération avec l’Estonian Defense League, après l’exercice PIKNE 2025. Le 3 octobre, les sapeurs français ont mené des entraînements à la détonation d’explosifs aux côtés de leurs homologues estoniens, illustrant une entente technique fine. En Roumanie, à Cincu, place aux tranchées et aux tirs tous calibres avec l’exercice EAGLE OPPORTUNITY : du missile antichar au canon de 25 mm, tout y passe.
Ukraine : un soutien discret mais ciblé
En Pologne, la mission EUMAM de l’Union européenne se poursuit. Cette semaine, la France a concentré son effort sur la formation NEDEX (neutralisation, enlèvement et destruction d’explosifs). Des instructeurs ukrainiens sont aussi formés à la pédagogie militaire pour démultiplier les capacités de l’armée ukrainienne. Un appui stratégique, loin des projecteurs, mais qui pèse lourd sur le terrain.
Mer du Nord, Atlantique et mer Noire : surveiller, ravitailler, coopérer
En mer de Norvège, une frégate française a été ravitaillée par le HNOMS Maud, renforçant la synergie franco-norvégienne. Le 6 octobre, un sous-marin russe a été détecté au large de la Bretagne par une frégate française, preuve que la guerre des nerfs se joue aussi sous l’eau. Plus au sud, en mer Noire, l’exercice POSEIDON 25 a rassemblé 13 nations autour de la guerre des mines, avec la participation du GPD Méditerranée français. L’OTAN y affine ses réflexes pour garantir la liberté de navigation.
Proche-Orient : du ciel irakien à la ligne bleue du Liban
Au Levant, les Rafale français ont effectué 14 sorties dans le cadre de l’Opération Inherent Resolve. Deux d’entre elles ont été réalisées en coordination avec des contrôleurs aériens irakiens. Au sol, la Task Force Lamassu, formée de militaires français, a lancé une formation ciblée d’un bataillon d’élite irakien.
Au Liban, les soldats de la Force Commander Reserve ont conduit une mission de reconnaissance à Bint Jbeil en lien avec les Forces armées libanaises. Une manière de soutenir leur redéploiement dans le Sud et de stabiliser la ligne bleue.
En mer Rouge, les frégates françaises engagées dans la mission ASPIDES ont escorté trois navires marchands et un pétrolier, assurant la continuité du trafic entre Suez et Ormuz. Un rappel : la guerre économique commence souvent sur les mers.
Afrique : formation tactique et lutte contre la pêche illégale
Au Gabon, les formations françaises au sein du DLIA-G continuent : emploi de drones, combat en zone urbaine, tir au mortier. En parallèle, les élèves de l’académie APERN reçoivent une formation au combat en jungle, utile face à l’orpaillage illégal.
Dans le golfe de Guinée, le porte-hélicoptère amphibie (PHA) mène l’opération CORYMBE. Ses aéronefs assurent des vols de surveillance maritime avec les autorités ghanéennes et ivoiriennes. Les stagiaires des marines locales, formés dans l’académie SIREN, participent pleinement aux opérations.
Des manœuvres de ravitaillement ont aussi eu lieu avec le patrouilleur espagnol ESPS Rayo. Une Europe navale qui apprend à travailler ensemble, loin de ses bases.
Indopacifique : un pivot stratégique de plus en plus affirmé
Au Mozambique, les FAZSOI françaises forment les militaires locaux à la maintenance des véhicules dans le cadre de l’opération EUMAM. Loin des projecteurs, ce travail structure les capacités logistiques de l’armée mozambicaine, en lutte contre le terrorisme.
Aux Philippines, l’exercice SAMA-SAMA 25 bat son plein, réunissant la France, les États-Unis et Manille autour de la surveillance maritime et du déminage. Un Falcon 50 français en provenance de Polynésie est mobilisé pour l’occasion.
En Polynésie, une session de formation au « Visit, Board, Search and Seizure » (VBSS) a réuni militaires fidjiens, tongiens et français à Papeete. La France montre qu’elle sait aussi jouer collectif dans le Pacifique Sud.
Antilles : souveraineté et coopération régionale
En Martinique, un stage d’initiation commando a permis à des militaires dominicains de s’aguerrir en zone tropicale. Techniques de combat, cohésion et résilience étaient au programme.
En parallèle, un bâtiment de soutien BSAOM a patrouillé autour de Saint-Martin pour assurer la souveraineté maritime et prévenir les trafics. Une mission discrète, mais essentielle.
Un dispositif global, ajusté à chaque théâtre
La semaine du 2 au 9 octobre 2025 montre une France pleinement engagée sur tous les fronts. Derrière chaque exercice, chaque formation, chaque mission, se cache un double objectif : préserver les intérêts stratégiques français et affiner les réflexes d’une armée de coalition.
Dans un monde incertain, cette présence globale est moins un luxe qu’une nécessité.
Déploiement hebdomadaire des forces françaises par zone (2–9 octobre 2025)
Zone géographique | Effectifs estimés | Principales missions |
---|---|---|
Europe (Espagne, Estonie, Roumanie, Pologne) | ~500 militaires | Exercice TLP (184 pax), coopération en Estonie, tirs en Roumanie, mission EUMAM pour l’Ukraine |
Proche-Orient (Irak, Liban, mer Rouge) | ~400 militaires | Opération Chammal (Rafale, TF Lamassu), FINUL au Liban, escortes ASPIDES en mer Rouge |
Afrique (Gabon, golfe de Guinée) | ~350 militaires | Formations tactiques, lutte contre la pêche illégale, coopération navale |
Indo-Pacifique (Mozambique, Philippines, Polynésie) | ~300 militaires | Formations EUMAM, exercices SAMA-SAMA, entraînements VBSS |
Antilles (Martinique, Saint-Martin) | ~100 militaires | Stage commando, surveillance maritime, coopération régionale |
Total estimé | ~1 650 militaires | Déployés hors métropole sur 5 zones majeures |
Source : Ministère des armées
Image : Ls Rafale déployés sur la base aérienne projetée au Levant ont réalisé 14 sorties dans le cadre de l’OPERATION INHERENT RESOLVE (OIR) en Irak.