L’Australie ne veut plus dépendre des autres pour sa défense : un missile européen pourrait bientôt y être fabriqué de A à Z.
En plein sommet Indo-Pacific 2025, une annonce passée presque inaperçue pourrait bien redessiner la carte de l’industrie militaire dans la région. L’Australie a signé un accord de principe avec MBDA pour produire localement le missile sol-air Mistral. Une avancée stratégique qui dépasse largement le simple geste industriel.
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Une alliance franco-australienne discrète mais ambitieuse
Le 5 novembre 2025, lors du salon Indo-Pacific à Sydney, le groupe australien NIOA et le géant européen MBDA ont signé un protocole d’accord qui pourrait faire de l’Australie le premier pays au monde, hors France, à produire le missile Mistral. Officiellement, l’objectif est de renforcer la souveraineté industrielle de Canberra dans le cadre de son programme GWEO (Guided Weapons and Explosive Ordnance). Dans les faits, c’est une manière de répondre à la montée en puissance de la Chine dans le Pacifique.
Objectif souveraineté, mais pas sans partenaires
NIOA n’est pas un novice dans le domaine : l’entreprise australienne gère déjà plusieurs sites de production d’armementet possède une solide expertise en explosifs militaires. MBDA, de son côté, apporte une architecture industrielle éprouvée, capable d’être partagée via des schémas de co-développement, co-production et maintenance partagée. Résultat : une alliance gagnant-gagnant qui renforcerait la capacité locale à produire des missiles de courte portée.
Le Mistral, un petit missile aux grands effets
Le Mistral 3 est un missile infra-rouge à guidage autonome, conçu pour intercepter des menaces à basse altitude : drones, hélicoptères, missiles de croisière… Grâce à son capteur IIR refroidi, il peut détecter des cibles faiblement visibles, même en présence de leurres. Long de 1,88 mètre pour moins de 20 kg, il atteint une vitesse de 930 m/s, peut encaisser 30 G, et engage des cibles jusqu’à 8 000 m de distance et 6 000 m d’altitude. Le taux de réussite est annoncé à 96 %.
Données techniques clés du Mistral 3
| Caractéristique | Détail |
| Longueur | 1,88 m |
| Diamètre | 92 mm |
| Poids | < 20 kg |
| Vitesse | 930 m/s |
| Portée | 500 m à 8 000 m |
| Altitude d’engagement | Jusqu’à 6 000 m |
| Charge explosive | Environ 3 kg, à fragmentation dense |
| Durée de vie | Jusqu’à 20 ans sans maintenance |
Facile à déployer, rapide à recharger
Le système a été pensé pour la mobilité et la simplicité d’emploi. Opéré par un binôme – tireur et commandant –, le lanceur est équipé d’une viseur thermique utilisable de jour comme de nuit. Mise en position en moins de 5 secondes, rechargement rapide, tir en séquence… Tout est conçu pour tenir le rythme face à des attaques rapides ou multiples. Le faible poids du système limite la fatigue et facilite les changements de position fréquents.
Une architecture pensée pour la polyvalence
Le Mistral se veut modulaire : il peut être déployé à l’épaule, sur des plateformes télécommandées (ATLAS RC), ou encore intégré sur des navires via les lanceurs SIMBAD RC. Il peut ainsi défendre aussi bien une section d’infanteriequ’un patrouilleur côtier. Cette adaptabilité réduit les coûts logistiques et permet une standardisation partielle de la chaîne de production.

Une arme pensée pour un futur saturé
Avec sa guidage passif, le Mistral fonctionne en mode EMCON, c’est-à-dire sans émettre de signaux détectables. Idéal pour rester furtif. Intégré à une architecture de défense en couches, il s’attaque à la dernière ligne : drones, hélicoptères, munitions rôdeuses… En se connectant aux réseaux tactiques type Link 16, il peut même être intégré à des structures interarmées, renforçant l’interopérabilité avec les alliés.
Un enjeu industriel bien plus large
Produire un missile, ce n’est pas seulement assembler un tube. Cela implique la fabrication de têtes explosives, des bancs de tests, des certifications de sécurité… Bref, une chaîne industrielle complète et robuste. Cela permet à l’Australie de réduire sa dépendance aux importations, de raccourcir les délais entre la commande et la mise en service, et de développer des compétences stratégiques locales. Une logique de résilience nationale.

Un missile disponible… tout de suite
Contrairement à d’autres projets encore en R&D, le Mistral est déjà produit à grande échelle et utilisé par de nombreux partenaires européens. Pour l’Australie, c’est l’assurance d’une mise en service rapide, tout en intégrant un système éprouvé. En maintenant la compatibilité avec la chaîne d’approvisionnement mondiale de MBDA, Canberra évite les goulets d’étranglement.
Une portée stratégique dans l’Indo-Pacifique
Ce projet ne concerne pas seulement l’industrie locale. Dans un théâtre indo-pacifique où les bases et les convois doivent être protégés en permanence, le Mistral devient un outil clé pour assurer la liberté d’action des forces alliées. Sa disponibilité, sa modularité et sa fiabilité pourraient susciter l’intérêt de nouvelles armées régionales, à la recherche de solutions clés en main.
Source : MBDA