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Cette nation asiatique refuse de céder devant la Chine et prépare une nouvelle « arme » pour rattraper son retard : un réacteur de 200 MW pour sous-marin nucléaire

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Guillaume Aigron

Guillaume Aigron

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Réacteur nucléaire secret, sous-marins géants et rivalité silencieuse : l’Inde se prépare à la guerre des profondeurs. Dans les laboratoires du BARC, à Mumbai, loin des regards, l’Inde façonne en …

Cette nation asiatique refuse de céder devant la Chine et prépare une nouvelle "arme" pour rattraper son retard : un réacteur de 200 MW pour sous-marin nucléaire

Réacteur nucléaire secret, sous-marins géants et rivalité silencieuse : l’Inde se prépare à la guerre des profondeurs.

Dans les laboratoires du BARC, à Mumbai, loin des regards, l’Inde façonne en silence une nouvelle « arme » : une centrale miniature, taillée pour les abysses. Ce réacteur nucléaire de 200 mégawatts électriques est destiné à propulser la prochaine génération de sous-marins indiens, capables de rôder pendant des mois sous l’océan sans jamais remonter.

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L’information a été confirmée à demi-mot par un scientifique anonyme du Bhabha Atomic Research Centre (BARC). Il s’agit d’un projet classé top secret, mais désormais connu sous le nom de « réacteur nucléaire 200 MW pour sous-marins » (oui, c’est assez « textuel » comme nom de code).
Objectif : rattraper, voire surpasser, la puissance croissante de la flotte nucléaire chinoise.

À l’horizon 2030, Pékin devrait aligner la plus grande flotte de sous-marins nucléaires au monde, selon les estimations américaines. Pour New Delhi, il ne s’agit plus seulement de modernisation : c’est une course existentielle, une réponse stratégique à une montée en puissance navale sans précédent dans l’Indo-Pacifique.

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Une montée en gamme radicale : du 83 MW au 200 MW

L’Inde possède déjà des sous-marins nucléaires opérationnels : l’INS Arihant, l’INS Arighaat et bientôt l’INS Aridhaman, tous propulsés par un modeste réacteur de 83 MWe. Ces unités ont permis à l’Inde d’entrer dans le club très fermé de la dissuasion nucléaire embarquée, mais leurs performances restent limitées.

Le nouveau réacteur de 200 MW, lui, doublerait l’endurance, la vitesse et la discrétion des futurs bâtiments. L’un des premiers à en bénéficier sera le sous-marin S5, un mastodonte de 13 000 tonnes, armé de 12 à 16 missiles balistiques K-5, capables de frapper une cible à 5 000 km.

L'INS Aridhaman.
L’INS Aridhaman.

Dix ans d’autonomie sous les mers

Ce qui frappe les spécialistes, c’est la longévité annoncée de ce réacteur : dix années sans ravitaillement.
Grâce à un cœur à eau pressurisée alimenté par de l’uranium enrichi, le système offrirait une autonomie stratégique de très longue durée, cruciale pour assurer une dissuasion crédible, sans dépendre d’un retour à quai.

Selon les fuites relayées par Defence.in, les phases de simulation numérique et de conception seraient achevées, ouvrant la voie à la fabrication effective. L’armée indienne reste muette. Le gouvernement aussi. Mais le calendrier semble s’accélérer.

Une pièce maîtresse dans la triade nucléaire indienne

L’Inde n’a jamais officiellement abandonné sa doctrine de « non first use », mais elle a renforcé depuis 2016 les capacités de frappe en second, en particulier grâce à la composante maritime de sa triade.

  • Terre : missiles Agni à portée intermédiaire
  • Air : Rafale et Su-30 modifiés pour l’emport nucléaire
  • Mer : sous-marins nucléaires capables de tir de missiles balistiques (SSBN)

Le S5, avec son réacteur surpuissant, deviendra le pilier mobile et indétectable de cette stratégie. Même en cas de destruction partielle du territoire ou de l’aviation, il garantira une riposte nucléaire, ce que les stratèges appellent la “survivabilité du second coup”.

Une vitrine technologique à double usage

Le président de la Commission à l’énergie atomique indienne, A.K. Mohanty, a profité de la 69e conférence de l’AIEA à Vienne pour rappeler que le BARC développe aussi d’autres réacteurs expérimentaux, dont :

  • un réacteur nucléaire de 555 MW
  • un réacteur à haute température refroidi au gaz, pensé pour produire de l’hydrogène bas carbone via procédés thermochimiques

Le savoir-faire acquis pour les sous-marins pourrait irriguer d’autres pans industriels, civils et militaires. L’expertise sur les petits réacteurs nucléaires ouvre aussi la porte à des projets de SMR indiens, compatibles avec les objectifs de neutralité carbone du pays.

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Une flotte qui s’étoffe sous la ligne de flottaison

En parallèle de cette révolution nucléaire, l’Indian Navy prévoit aussi d’ouvrir un appel d’offres pour quatre nouveaux Landing Platform Docks (LPD), de vastes navires d’assaut capables de lancer des drones navals à voilure fixe et de servir de centres de commandement déployés.

Sous la mer comme en surface, l’Inde prépare un théâtre d’opérations futuriste, mobile, réactif, interconnecté, à des milliers de kilomètres des côtes.

Flotte de sous-marins nucléaires indienne

Sous-marin Type Déplacement Réacteur Armement Statut Commentaire
INS Arihant SSBN (balisé) 6 000 tonnes 83 MWe (eau pressurisée) 4 missiles K-15 (750 km) Opérationnel (depuis 2016) Premier SSBN indien, discret mais portée limitée. Sert surtout de plate-forme d’apprentissage.
INS Arighaat SSBN ~6 000 tonnes 83 MWe 4 à 8 missiles K-15 En service depuis 2022 (non confirmé officiellement) Version améliorée de l’Arihant, probablement plus silencieuse. Maintient la posture de dissuasion.
INS Aridhaman SSBN 7 000 tonnes (estimé) 83 MWe 12 missiles K-15 ou 4 K-4 (3 500 km) Essais en cours (2025) Premier sous-marin capable d’emporter des K-4 à longue portée. Transition vers une vraie dissuasion régionale.
Classe S5 SSBN 13 000 tonnes 200 MWe (nouveau design) 12 à 16 missiles K-5 (5 000 km) Développement en cours, mise à l’eau prévue vers 2031 Changement d’échelle stratégique : grande autonomie, frappe de second coup crédible, rivalise avec les Jin chinois.
Classe P-77 (nom temporaire) SSN (attaque) ~6 000 à 8 000 tonnes (estimé) 200 MWe (même réacteur que le S5) Torpilles lourdes, missiles de croisière BrahMos Programme lancé – 6 unités prévues Premiers véritables sous-marins d’attaque nucléaires indiens. Visent l’endurance et la polyvalence.
INS Chakra (ex-Akula russe) SSN (attaque) 12 770 tonnes 190 MW thermique (russe) Torpilles, missiles Loué à la Russie (2012–2021), rendu Location de formation. A permis à l’Inde d’acquérir l’expertise d’opération d’un vrai sous-marin nucléaire d’attaque.

💡 Légende :

SSBN : Sous-marin nucléaire lanceur d’engins (missiles balistiques)

SSN : Sous-marin nucléaire d’attaque (torpilles, missiles de croisière)

MWe : Puissance électrique nette du réacteur

K-15/K-4/K-5 : Missiles balistiques indiens de différentes portées

Source : https://timesofindia.indiatimes.com/india/bhabha-atomic-research-centre-making-reactor-for-navys-next-generation-nuclear-submarines/articleshow/124005864.cms

Image : Pprototype terrestre du CLWR-B1. En raison de sa capacité à simuler complètement les compartiments d’alimentation et de propulsion de l’Arihant, il a été désigné sous le nom de sous-marin « S1 », alors que le premier sous-marin réel (l’INS Arihant) a été désigné sous le nom de S2

À propos de l'auteur, Guillaume Aigron