Avec 150 000 obus en ligne de mire, la France muscle discrètement son industrie d’armement terrestre pour une économie de guerre assumée.
Alors que les conflits s’éternisent en Ukraine et au Proche-Orient, Paris anticipe une décennie sous haute tension. La signature d’un contrat massif entre KNDS France et Les Forges de Tarbes relance la machine industrielle française sur la durée. Moins visible qu’un Rafale ou un char Leclerc, l’obus de 155 mm devient pourtant une pièce maîtresse de la stratégie militaire française.
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Pourquoi un tel accord change tout ?
En apparence, il ne s’agit que d’un contrat de munitions. Mais dans le contexte actuel, cet accord triennal reconductible(jusqu’en 2031) engage bien plus qu’une simple commande. Il scelle une rupture dans la logique d’approvisionnementdu ministère des Armées, passant de commandes annuelles à un cadre pluriannuel prévisible. Cette stabilité permet à Les Forges de Tarbes, principal fournisseur de corps creux pour obus de 155 mm, de doubler ses capacits de production si besoin, sans renégocier chaque année.
Une production dopée par l’urgence stratégique
La plage de 60 000 à 150 000 obus sur trois ans permet de répondre à une demande en forte hausse, notamment due à la consommation massive de munitions en Ukraine. Le calibre 155 mm, standard OTAN, est utilisé par la quasi-totalité des armées occidentales. Cette commande anticipe les besoins à long terme : réassort des stocks, soutien à l’Ukraine, et constitution d’une réserve nationale de crise.
Un outil industriel remis sous tension
Ce contrat permet à Les Forges de Tarbes de prévoir ses investissements matériels et humains : achat de nouvelles presses, formation de tourneurs-spécialistes, embauches prévues pour tenir le rythme de forge. Ce retour à une production en flux tendu mais continue est au cœur de la doctrine française d’ »économie de guerre ». Le site, stratégique, peut ainsi rester opérationnel sans attendre les crédits de chaque loi de finances annuelle.
Un modèle inspiré par les besoins de l’OTAN
Les obus produits alimenteront en priorité KNDS France, fournisseur des canons Caesar, mais potentiellement aussi d’autres partenaires européens. Le calibre 155 mm équipe également les PzH 2000 allemands, les M109 américains et d’autres systèmes alliés. L’objectif est clair : assurer l’interopérabilité et la disponibilité rapide de munitions communes en cas d’engagement multinational ou de tension à la frontière orientale de l’Europe.
Un contrat agile en cas d’escalade militaire
Le contrat prévoit un mécanisme de « surge capacity », permettant à Tarbes de doubler ses livraisons si une guerre de haute intensité l’impose. Ce levier réduit les délais de négociation et les lenteurs administratives : une simple demande de l’armée suffit pour augmenter la cadence. Ce mode opératoire assure une flexibilité opérationnelle vitale face à l’imprévisibilité géopolitique.
Un retour au savoir-faire métallurgique français
Les Forges de Tarbes, spécialisées dans l’ébauche des corps d’obus, perpétuent une tradition de métallurgie lourde rare en Europe. La qualité du forgeage est déterminante pour supporter la pression au tir : plus de 3 tonnes/cm2 dans le tube. Tarbes maîtrise encore des compétences critiques que la France aurait perdues sans commande publique.
Une vision industrielle assumée
Ce contrat s’inscrit dans une stratégie plus large : faire revenir les armements terrestres au cœur des priorités industrielles. Alors que le spatial et l’aérien captent souvent la lumière, le retour à une production massive d’obus symbolise le virage opéré par le ministère des Armées vers la soutenabilité. L’enjeu n’est plus l’effet d’annonce, mais la durée et la capacité à durer en cas de guerre prolongée.
Source : KNDS France