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Ce pays d’Asie est le nouvel « Eldorado » des entreprises françaises comme Safran qui va pour la première fois y ouvrir un centre de maintenance pour son fameux M88

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Guillaume Aigron

Guillaume Aigron

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Comment Safran se fond dans le ciel indien. Hyderabad, 26 novembre 2025. Une haie d’honneur, un parterre de hauts gradés, deux drapeaux mêlés sous un même vent chaud. Ce jour-là, …

Ce pays d'Asie est le nouvel Eldorado pour les entreprises françaises comme Safran qui va pour la première fois y ouvrir un centre de maintenance pour son fameux M88

Comment Safran se fond dans le ciel indien.

Hyderabad, 26 novembre 2025. Une haie d’honneur, un parterre de hauts gradés, deux drapeaux mêlés sous un même vent chaud. Ce jour-là, le Premier ministre indien Narendra Modi et les dirigeants de Safran n’inaugurent pas simplement un nouveau bâtiment industriel. Ils scellent une alliance industrielle, militaire et technologique d’une ampleur inédite entre la France et l’Inde.

Safran vient effet d’y ouvrir  son plus grand centre mondial de maintenance pour les moteurs d’avions civils LEAP ainsi que son tout premier site MRO dédié aux moteurs militaires M88 du Rafale hors de France.

Une offensive industrielle assumée, doublée d’un message politique limpide : Make in India, yes but with Safran !

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Le plan de marche de Safran est d’une clarté chirurgicale. Tripler son chiffre d’affaires dans le pays d’ici 2030, pour dépasser les 3 milliards d’euros, avec la moitié de cette activité directement implantée localement. Cela signifie plus que de simples contrats : des usines, des emplois, des formations, des transferts de technologie.

Le centre MRO pour moteurs LEAP, construit pour 200 millions d’euros, s’étend sur 45 000 m². Dès 2026, il pourra entretenir 300 moteurs par an, avec un banc d’essai dernier cri, et plus de 1 100 employés à terme. Il ne s’agit pas d’un atelier satellite : c’est un pilier mondial du service après-vente du moteur le plus utilisé au monde, qui équipe notamment les Airbus A320neo et Boeing 737 MAX. L’Inde, avec plus de 2 000 moteurs LEAP en commande, est devenue le troisième marché mondial pour CFM International. Ce centre est donc stratégique… pour tout le groupe.

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Le M88 s’installe en terrain connu

Juste à côté, un autre site, plus discret mais tout aussi stratégique (voire plus) : un atelier de maintenance dédié au moteur M88. Ce bijou de technologie française est le turboréacteur qui équipe le Rafale de Dassault Aviation, déjà présent en Inde à 36 exemplaires, bientôt renforcé par 26 Rafale Marine. Le centre, de 5 000 m², pourra entretenir 600 modules moteurs par an, avec 150 techniciens spécialisés, exclusivement indiens.

Ce site n’est pas seulement une base logistique pour les avions de l’armée de l’air indienne. C’est aussi une capacité export, ouverte aux autres utilisateurs du M88 dans la région. L’objectif est double : renforcer la souveraineté logistique indienne, et faire de l’Inde un hub régional de maintenance aéronautique militaire.

Hyderabad s’impose comme l’un des pôles technologiques les plus dynamiques de l’Inde, avec un écosystème qui rassemble laboratoires, centres de R&D et industries aéronautiques. La ville abrite aussi un tissu industriel en pleine expansion, où s’installent des géants comme Safran, grâce à une main-d’œuvre qualifiée et à des infrastructures modernes.
Hyderabad s’impose comme l’un des pôles technologiques les plus dynamiques de l’Inde, avec un écosystème qui rassemble laboratoires, centres de R&D et industries aéronautiques. La ville abrite aussi un tissu industriel en pleine expansion, où s’installent des géants comme Safran, grâce à une main-d’œuvre qualifiée et à des infrastructures modernes.

Hammer : une bombe franco-indienne

Au-delà des moteurs, Safran passe à l’étape supérieure dans les armements. Le 24 novembre, à New Delhi, une coentreprise a été signée avec Bharat Electronics Limited (BEL), acteur central de l’électronique de défense indienne. L’objet : produire localement le missile air-sol modulaire Hammer, connu en France sous le nom d’AASM.

Le Hammer est un kit de précision qui transforme une bombe classique en munition guidée, capable de toucher une cible avec une précision métrique à plusieurs dizaines de kilomètres. Il équipe déjà le Rafale, mais pourra aussi être intégré sur le Tejas, le chasseur léger indien développé par HAL. Ce n’est plus un transfert de technologie : c’est une co-conception.

Bangalore, l’autre front de Safran

Hyderabad n’est pas seule dans la manœuvre. Safran a aussi investi plus de 30 millions d’euros à Bangalore en 2025 pour deux nouvelles implantations :

  • Un centre d’ingénierie spécialisé en avionique et actionneurs, qui accueillera 250 ingénieurs et techniciens.
  • Une usine de production d’électronique embarquée, qui emploiera 400 personnes à partir de 2026.

Avec ces projets, Safran renforce sa présence sur toute la chaîne de valeur : recherche, conception, production, support. L’Inde n’est plus un client. Elle devient un partenaire structurant, un pilier du modèle mondial du groupe.

Une relation enracinée depuis 70 ans

Cette accélération n’est pas une histoire de dernière minute. Safran est implanté en Inde depuis plus de 70 ans. Le partenariat avec HAL sur les moteurs d’hélicoptères ne date pas d’hier. En 2024, la coentreprise SAFHAL a lancé le développement du moteur Aravalli, destiné à équiper les futurs hélicoptères lourds des forces armées indiennes.

Aujourd’hui, 18 sites sont répartis sur le territoire indien, de Bangalore à Hyderabad en passant par New Delhi. 3 000 salariés travaillent déjà pour Safran en Inde, dans des activités allant de l’optronique à la propulsion, en passant par l’électronique de vol.

Et demain ? Olivier Andriès l’a résumé lors de l’inauguration : « L’Inde est devenue un centre de gravité stratégique pour Safran. »

Tableau récapitulatif – Safran en Inde (2025–2030)

Projet Lieu Investissement Capacité / Objectif Effectifs prévus
Centre MRO moteurs LEAP Hyderabad 200 M€ 300 moteurs/an 1 100 personnes
Atelier MRO moteurs M88 Hyderabad 40 M€ 600 modules/an 150 personnes
Coentreprise HAMMER avec BEL New Delhi NC Production locale de munitions air-sol NC
Centre d’ingénierie avionique Bangalore 15 M€ (est.) Développement avionique / actionneurs 250 personnes
Usine électronique et actionneurs Bangalore 15 M€ (est.) Production série dès 2026 400 personnes

 

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L’Inde, terre d’envol pour l’industrie française

Safran n’est pas seul à renforcer ses racines en Inde. Plusieurs fleurons de l’industrie française y jouent aujourd’hui un rôle stratégique de premier plan, dans un contexte où le pays cherche à moderniser massivement ses infrastructures, ses capacités militaires et son tissu industriel.

À travers ces coopérations, la France consolide sa position de partenaire stratégique de long terme de l’Inde, bien au-delà de la vente de matériel. Il s’agit d’un partenariat fondé sur le co-développement, la production locale et le partage de savoir-faire.

Investissements français récents en Inde (2023–2025)

Entreprise Secteur Projet Montant estimé Lieu
Safran Aéronautique / Défense MRO moteurs LEAP et M88, coentreprise HAMMER, sites à Bangalore 285 M€ Hyderabad, Bangalore, New Delhi
Dassault Aviation Défense Livraison de 26 Rafale Marine + offsets 5,5 Mds€ Base aéronavale + production HAL
Thales Électronique / Défense Centre de R&D, radars, optronique, systèmes de mission NC (plusieurs dizaines de M€) Noida, Bangalore
Naval Group Naval Programme Scorpène – classe Kalvari 3,3 Mds€ (contrat initial) Mumbai (MDL)
Airbus / Tata Aéronautique Production du C295, H125, projet A320 1,9 Mds€ (cumulé estimé) Hyderabad, Gujarat
TotalEnergies Énergie Projets solaires, hydrogène vert (avec Adani) 3 à 4 Mds€ (prévision 2023–2028) Gujarat, Tamil Nadu, Rajasthan

 

Source : Communiqué de presse de Safran

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