Avec son autonomie numérique, sa mobilité foudroyante et sa puissance de feu digne d’un canon naval, le nouveau RCH‑155 transforme la doctrine allemande. Ce canon automoteur sur roues ne tire pas seulement vite : il tire juste, il tire loin, et il disparaît avant qu’on ait pu riposter.
L’armée allemande vient d’activer un tout nouveau bataillon d’artillerie, le 215ᵉ, destiné à accueillir le RCH‑155, un système révolutionnaire monté sur châssis Boxer 8×8. Avec ce choix, Berlin tourne la page de l’artillerie lente et lourde pour miser sur la guerre de mouvement, celle où chaque seconde compte et où la survie dépend de la vitesse d’exécution. Le message est clair : l’Europe se prépare à frapper vite, loin, et en réseau.
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La renaissance d’une artillerie allemande taillée pour la guerre moderne
Le 215ᵉ bataillon d’artillerie a été officiellement créé à la caserne Rommel d’Augustdorf, sous le commandement du lieutenant-colonel Fabian Kolbe. Intégré à la 21ᵉ brigade blindée, ce bataillon marque la première étape d’une transformation doctrinale profonde : l’abandon progressif des chenillés lourds au profit de plateformes mobiles et numériques. Le choix du RCH‑155 (Remote Controlled Howitzer) symbolise cette nouvelle approche. Il combine la puissance d’un canon de 155 mm à la mobilité d’un véhicule à roues, capable d’atteindre 100 km/h sur route et de se déplacer sur 700 km sans soutien logistique majeur. Une révolution pour une armée qui veut désormais tirer et fuir avant la riposte.
Un monstre technologique de 8×8 qui tire à 50 kilomètres
Le RCH‑155 n’a rien d’un simple canon. C’est une tourelle entièrement téléopérée montée sur le châssis du Boxer, l’un des blindés les plus modulaires d’Europe. Sa pièce L52 de 155 mm peut frapper à 40 km avec des obus classiques, et jusqu’à 54 km avec des projectiles à longue portée de type Vulcano ou V‑LAP. Son autoloader permet de tirer jusqu’à 9 obus par minute, et son système MRSI (Multiple Rounds Simultaneous Impact) fait pleuvoir plusieurs projectiles sur une même cible… en même temps. Tout cela sans qu’aucun soldat ne soit exposé : les deux opérateurs restent protégés à l’avant du véhicule, dans une capsule blindée niveau STANAG 4, résistante à 10 kg de TNT sous la coque.
Une mobilité stratégique que les PzH 2000 ne peuvent plus suivre
Contrairement au mythique PzH 2000, canon automoteur à chenilles redouté mais lent, le RCH‑155 a été pensé pour le combat dispersé. En moins de 20 secondes, il passe de la route au tir, déclenche sa salve, puis repart en 10 secondes. Ce cycle éclair complique tout tir de contre-batterie adverse. Grâce à son châssis Boxer, il peut être transporté par train ou avion, offrant à la Bundeswehr une réactivité inédite pour renforcer un front en urgence. Cette agilité répond à une réalité du XXIᵉ siècle : face aux drones et aux frappes de précision, l’artillerie doit bouger aussi vite que les blindés.
Une architecture pensée pour la guerre en réseau
L’atout majeur du RCH‑155 est invisible à l’œil nu : sa numérisation complète. Relié en temps réel aux systèmes de commandement de l’OTAN, il reçoit les coordonnées de cibles issues de drones, satellites ou radars terrestres. Il peut donc frapper sans ligne de vue, avec une précision redoutable. Ce maillage numérique transforme chaque canon en nœud d’un réseau de feu collaboratif, capable de coordonner ses frappes avec d’autres batteries situées à plusieurs centaines de kilomètres. L’Allemagne parie ici sur une guerre connectée, où la donnée est aussi décisive que la poudre.
Trois batteries, une logistique intégrée et un commandement tourné vers l’Europe
Le nouveau bataillon est structuré autour de trois batteries de tir équipées du RCH‑155 et d’une unité de soutien dédiée à la maintenance et à l’approvisionnement. Cette organisation respecte les standards OTAN, facilitant son intégration dans les forces multinationales. Chaque unité disposera d’équipes formées pour opérer dans des environnements variés : plaines d’Europe de l’Est, zones boisées ou terrains semi-urbains. Le 215ᵉ bataillon deviendra ainsi un laboratoire tactique pour tester la doctrine de “l’artillerie agile” chère à Berlin.
Un programme d’armement qui dépasse les frontières allemandes
Le programme RCH‑155 ne se limite pas à la Bundeswehr. Le système a déjà séduit l’Ukraine et le Royaume-Uni, et d’autres pays européens pourraient suivre. L’objectif affiché est clair : créer une interopérabilité complète entre les forces alliées pour mutualiser les stocks de munitions, la maintenance et les formations. Berlin prévoit à terme 168 exemplaires du RCH‑155, tout en augmentant le parc de PzH 2000 de 134 à 166 unités. En parallèle, 36 lance-roquettes M270 MARS et le projet EuroPULS viendront compléter la panoplie de feux à longue portée, pour une couverture du champ de bataille du contact à 500 km.
Tableau récapitulatif – Données clés du RCH‑155
Caractéristique | Valeur |
Calibre | 155 mm / L52 |
Portée max. (V-LAP) | 54 km |
Cadence de tir | 9 obus/min |
Équipage | 2 personnes |
Vitesse max. | 100 km/h |
Autonomie | 700 km |
Protection | Niveau STANAG 4 |
Temps de tir initial | 20 s |
Temps de repli | 10 s |
L’Europe de la dissuasion mobile : la leçon du front ukrainien
La création du 215ᵉ bataillon n’est pas un simple réarmement. C’est la traduction concrète d’un virage stratégique : celui d’une Europe prête à combattre vite et loin, sans dépendre d’un unique front. En combinant portée, précision et mobilité, le RCH‑155 prépare la Bundeswehr à une guerre où le temps de réaction se compte en secondes, pas en heures.
Source : Armée fédérale Allemande