La Chine teste des barges de débarquement géantes en toute discrétion.
À 1 500 mètres des côtes chinoises, des véhicules civils embarquent lentement sur une plateforme métallique montée sur vérins hydrauliques. Une rampe se déploie… puis s’allonge jusqu’à atteindre 120 mètres de long. Derrière ce dispositif amphibie, Pékin prépare une offensive à bas bruit : celle d’un débarquement éclair sur les plages taïwanaises. Une guerre amphibie qui ne dit pas son nom, mais dont chaque essai confirme les contours.
La rampe n’est pas encore posée sur le sable de Kinmen, mais le chemin semble déjà tracé.
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La Chine teste des barges de débarquement géantes pour une possible opération sur Taïwan
Les nouvelles barges du type Shuiqiao, littéralement « pont d’eau », ont discrètement entamé leurs essais en mer. Fabriquées dans les chantiers navals de Canton, elles sont désormais testées avec des véhicules civils et des camions militaires dans des manœuvres filmées depuis les satellites.
Ces embarcations ont une particularité : elles combinent plateforme hydraulique sur vérins et pont rétractable inspiré des passerelles de type Bailey, conçues durant la Seconde Guerre mondiale. Avec une capacité de franchissement de 120 mètres, elles peuvent contourner les zones minées, les falaises et même les récifs.
Composant | Description |
Type de barge | Shuiqiao |
Longueur de rampe | 120 mètres |
Largeur de passage | Adaptée aux blindés et véhicules lourds |
Plateforme | Jack-up sur pieds hydrauliques |
Capacité de charge | Supérieure à 50 tonnes |
Sous prétexte d’aider aux secours en cas de catastrophe naturelle, ces barges seraient en réalité conçues pour un usage militaire direct : projeter chars, troupes et véhicules sur des plages non fortifiées, en quelques minutes, sans avoir besoin d’un port.
Des îles visées bien avant l’île principale
Les craintes de Taipei se concentrent sur les îles de l’archipel périphérique. Kinmen, Matsu, Penghu : autant de cibles vulnérables situées à quelques kilomètres seulement du continent.
En avril, la Chine a lancé l’exercice « Tonnerre du détroit‑2025A », impliquant avions, navires et missiles autour de ces zones. Début juin, les porte-avions Liaoning et Shandong ont croisé au large de Taïwan, escortés par une flotte complète. Les Shuiqiao ne sont qu’un maillon supplémentaire dans ce dispositif amphibie.
Ce qui inquiète, ce n’est pas la démonstration de force en elle-même, mais sa régularité. Le moindre test logistique devient désormais un entraînement au débarquement. Et ce qui est simulé aujourd’hui avec des voitures pourrait très vite se faire avec des blindés Type-05 ou des véhicules lance-missiles.
Une guerre qui commence au bout du quai
La structure des Shuiqiao évoque celle des ports artificiels Mulberry, utilisés par les Alliés en 1944 en Normandie. Même logique de modularité, même ambition de projection rapide. Ce ne sont plus des navires de guerre, ce sont des plateformes industrielles militarisées, capables de se fondre dans le décor civil avant d’être activées en urgence.
Les experts taïwanais craignent que la Chine les utilise comme cavaliers d’échecs, pour frapper dans les zones laissées sans surveillance, au détour d’un estuaire ou d’une plage secondaire. Une frappe surprise, locale, mais suffisante pour briser la chaîne défensive.
Scénario | Détail technique |
Débarquement silencieux | Depuis des barges sans signature radar |
Prise d’îlots stratégiques | Kinmen, Matsu, estuaires peu surveillés |
Usure psychologique | Multiplication des exercices à la frontière |
Saturation défensive | Diversion par essaims et drones marins |
La nature « double usage » de ces plateformes, civiles en apparence, militaires en essence, complique fortement la lecture stratégique du renseignement taïwanais. Elles échappent aux détections conventionnelles.
Des essais en mer sous surveillance étroite
En parallèle, les forces armées chinoises multiplient les exercices à 1,5 kilomètre des côtes de la province du Fujian, point de départ probable d’un débarquement. Des blindés amphibies Type‑05 ont été vus fonçant vers des plages factices, pendant que des drones survolaient la zone.
Dans les simulations organisées à Taipei avec des experts japonais et américains, le consensus est clair : les premières cibles d’une offensive seraient les îles proches, prises en quelques heures, sans déclaration préalable.
Les barges Shuiqiao participent d’une stratégie de frappe éclair, combinée aux autres moyens du triptyque naval chinois : porte-hélicoptères de type 075, porte-avions et forces amphibies.
Une armée prête à agir, une île qui doute
L’état-major américain l’a annoncé : la Chine pourrait lancer une offensive complète sur Taïwan entre 2026 et 2027, dans ce que la CIA appelle la “fenêtre Davidson”. Les barges Shuiqiao illustrent une stratégie plus diffuse : encercler, démonter les défenses, étirer les lignes de commandement.
Du côté de Taipei, les responsables admettent la faiblesse de certaines zones côtières, en particulier les embouchures de rivière ou les plages secondaires. Des efforts ont été engagés pour moderniser les missiles côtiers, acheter des drones marins, et installer des réseaux de surveillance automatisés. Mais le temps manque.
Les simulations de juin ont montré une cohésion intérieure fragile en cas de crise prolongée, ainsi qu’une dépendance persistante aux soutiens étrangers, notamment américains.
Une architecture amphibie pour demain
Les Shuiqiao, par leur capacité d’adaptation et leur silhouette anodine, incarnent la guerre de demain selon Pékin : souple, modulaire, logistique avant d’être spectaculaire.
L’architecture amphibie n’est plus un projet théorique. Elle est à l’essai, en condition réelle, intégrée dans un écosystème militaire en expansion rapide. À chaque sortie en mer de ces barges, le filet se resserre un peu plus autour de Taïwan, sans un coup de feu.
Quand l’ennemi se présente sous la forme d’un convoi de camions sur un pont mobile, c’est peut-être déjà trop tard.
Source : Dailymotion