Ce missile va remplacer le Minuteman III après plus d’un demi-siècle de service. Conçu pour durer jusqu’en 2075, il pose déjà les bases d’une nouvelle doctrine nucléaire américaine face à Pékin et Moscou.
Les États-Unis viennent de passer un cap. À Minot, dans le Dakota du Nord, l’armée de l’air a enclenché le déploiement de son nouveau missile intercontinental, le Sentinel. Avec lui, c’est une page entière de la guerre froide qui se tourne – et un message clair envoyé à la Chine et à la Russie : l’Amérique modernise, et elle ne le fait pas à moitié.
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Une base du Dakota du Nord entre dans l’histoire
Minot, 7 juin 2025. Ce qui ressemblait à une simple cérémonie d’unité militaire s’est avéré être un jalon historique : l’activation du “Detachment 12”, une cellule dédiée au déploiement du missile Sentinel. Le programme n’est plus une rumeur de Pentagone : les travaux commencent, les silos vont être rénovés, les câbles tirés, les hommes formés. Cela faisait plus de 50 ans que les missiles Minuteman III étaient le pilier nucléaire terrestre des États-Unis. Désormais, le relais est passé. Et pas à n’importe quel missile : le Sentinel, taillé pour durer un demi-siècle, résister aux cyberattaques, et frapper à plus de 10 000 km.
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Tout changer, sauf l’essentiel
Ce nouveau missile ne modifie pas la charge nucléaire : ce sont toujours les ogives W87, gérées par le ministère de l’Énergie, qui équipent les têtes. Ce qui change, c’est tout le reste. Silos, réseaux, câblage, systèmes de commandement, contrôle et communication. Un bond technologique de plusieurs générations. L’enjeu est simple : garantir que l’arme reste opérationnelle, mobile et invulnérable dans un monde où la menace n’est plus seulement balistique, mais aussi numérique. Le Sentinel pourra être mis à jour au fil du temps. C’est un missile évolutif, modulaire, conçu comme une plateforme vivante.
Trois bases sous haute tension
Les travaux ne concernent pas uniquement Minot. Deux autres bases sont concernées : F.E. Warren dans le Wyoming et Malmstrom dans le Montana. Ensemble, ces trois sites abritent aujourd’hui plus de 400 missiles, tous destinés à être remplacés dans les prochaines années. Chaque site est en chantier. Au programme : renforcement des systèmes de communication, modernisation des postes de commande, installation des nouveaux silos. Un défi logistique majeur, piloté par le SATAF (Sentinel Activation Task Force), en lien direct avec les industriels.
Le chantier d’armement le plus ambitieux depuis la Guerre froide
Le coût ? Plusieurs dizaines de milliards d’euros étalés jusqu’en 2030. Aux commandes, Northrop Grumman, accompagné de sous-traitants répartis sur tout le territoire. Le rythme est militaire : aucun retard toléré. L’US Air Force veut que le système soit opérationnel sans interruption, même en pleine transition. Chaque base active une cellule dédiée. Chaque étape est suivie par le Pentagone. Des essais sont déjà programmés dans les champs de tir de l’Utah. Le calendrier prévoit un déploiement complet à partir de 2030.
Ce missile ne ressemble à rien de ce qu’on connaît
Le Sentinel ne se contente pas de voler loin. Il est plus rapide, plus silencieux, et surtout capable de rester connecté dans un environnement brouillé ou attaqué électroniquement. Il peut être mis à jour comme un smartphone, sans démontage. Il est même conçu pour intégrer à terme l’IA militaire.
Parmi les points forts :
- Une propulsion solide de dernière génération
- Une trajectoire ultra-précise malgré les interférences
- Une capacité de relocalisation automatique des cibles en temps réel
- Un système de guidage cyberprotégé
Le tout dans une coque capable de supporter les pires conditions thermiques et électromagnétiques.
Une réponse à la Russie… et surtout à la Chine
Pourquoi maintenant ? Parce que la Russie a mis en service son missile Sarmat, capable d’embarquer des têtes multiples. Parce que la Chine construit des centaines de silos dans ses régions désertiques. Et parce que les vieilles infrastructures américaines, elles, commençaient à craquer. Le Sentinel n’est pas une arme d’attaque. C’est une arme de crédibilité. En le déployant, Washington envoie un message clair : sa dissuasion nucléaire est prête, moderne, et non négociable. Et ce, jusqu’en 2075.
Un projet national, un impact local
À Minot, cette modernisation se traduit déjà par des millions d’euros investis dans les infrastructures, les routes, le logement. Des centaines d’emplois directs et indirects. Le commandant du détachement, le lieutenant-colonel Nicholas Conover, le dit lui-même : sans la communauté locale, le programme ne tient pas debout. Entreprises sous-traitantes, ouvriers spécialisés, renforcement des équipes civiles : tout le comté de Ward, dans le Dakota du Nord, va vivre au rythme de Sentinel. Et pendant au moins les 50 prochaines années.
Tableau des grandes étapes du programme Sentinel
Année | Événement | Lieu |
1970 | Mise en service du Minuteman III | Continental USA |
2023 | Lancement de la production industrielle du Sentinel | États-Unis |
2024 | Travaux de modernisation sur les trois bases | Minot, Malmstrom, F.E. Warren |
Juin 2025 | Activation officielle du SATAF Detachment 12 | Base de Minot, Dakota du Nord |
Vers 2030 | Déploiement complet du Sentinel | Bases multiples |
Jusqu’en 2075 | Durée de vie opérationnelle du système Sentinel | USA continental |
Source : Northrop Grumman