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La Turquie lance un exercice militaire monstre en mer pour démontrer sa puissance

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Marc Basoli

Marc Basoli

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Avec plus de 120 navires, des drones, des missiles tirés en conditions réelles et la participation de toutes ses forces armées, la Turquie orchestre le plus vaste entraînement naval de …

La Turquie lance un exercice militaire monstre en mer pour démontrer sa puissance régionale

Avec plus de 120 navires, des drones, des missiles tirés en conditions réelles et la participation de toutes ses forces armées, la Turquie orchestre le plus vaste entraînement naval de son histoire. Un message clair envoyé à ses voisins et à l’OTAN.

Du 5 au 17 mai 2025, Ankara organise un exercice militaire hors normes qui mobilise l’écrasante majorité de sa flotte et de ses moyens aériens. Baptisée Denizkurdu-II/2025, cette opération géante s’étend sur quatre mers et implique des tirs de missiles réels, des manœuvres amphibies et une coordination inédite entre l’armée de terre, de l’air, la gendarmerie et la garde-côtière. Jamais un tel niveau de mobilisation n’avait été atteint en temps de paix.

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Une démonstration de force sur tous les fronts

La manœuvre se déroule simultanément en mer Noire, mer Égée, mer de Marmara et Méditerranée orientale, mobilisant 120 bâtiments, dont 104 navires de surface, 6 sous-marins et 52 vecteurs aériens pilotés ou autonomes. Il s’agit d’un bond de 40 % par rapport à l’édition 2021. L’opération est pilotée depuis Gölcük par un centre de commandement de 93 personnes, placé sous la direction de l’amiral Kadir Yıldız. L’objectif : tester la capacité de l’armée turque à gérer un conflit à haute intensité, coordonner ses forces et démontrer son autonomie stratégique.

Tirs réels et missiles de nouvelle génération

Pour la première fois, l’exercice inclut des tirs réels de missiles ATMACA, fabriqués en Turquie par Roketsan. Cette arme anti-navire dépasse les 220 km de portée, vole en rase-motte pour éviter les radars, et dispose d’un moteur à réaction entièrement conçu localement.

Voici un tableau récapitulatif des principaux tests :

Arme testéeOrigineType d’essai
ATMACATurquieTir réel depuis navire et sous-marin
SM-1États-UnisContre cible aérienne rapide
MAM-T, Cirit, TEMRENTurquieMunition guidée depuis drones

Ces essais montrent que la Turquie passe d’une armée consommatrice à une puissance exportatrice d’armements, capable de fabriquer et tester ses propres systèmes sur le terrain.

Des opérations combinées à grande échelle

Au-delà de la marine, toutes les branches de l’armée turque sont mobilisées pour mener des opérations interarmées. L’exercice implique :

  • Des assauts amphibies sur des zones côtières
  • Des scénarios de guerre anti-sous-marine
  • La pose de mines maritimes par drones
  • L’utilisation de drones armés pour des frappes de précision

Même les célèbres unités SAT et SAS, spécialistes des actions sous-marines offensives et défensives, sont déployées pour des missions spécifiques, illustrant l’ampleur tactique de l’opération.

Développé pour remplacer directement le missile Harpoon de fabrication américaine, l'ATMACA offre une portée plus longue (plus de 220 km), des profils de vol rasants et un système de propulsion de fabrication turque
Développé pour remplacer directement le missile Harpoon de fabrication américaine, l’ATMACA offre une portée plus longue (plus de 220 km), des profils de vol rasants et un système de propulsion de fabrication turque. (Source de l’image : Roketsan)

Le TCG Anadolu en vedette

Le navire amiral TCG Anadolu, porte-hélicoptères amphibie récemment entré en service, joue un rôle central. Il sert de base flottante pour les nouveaux drones Bayraktar TB-3, capables de décoller depuis une piste courte. Ce déploiement montre l’avancée turque en matière de systèmes autonomes et l’intégration croissante de drones dans la stratégie navale. Le TCG Anadolu devient un symbole technologique national, capable de projeter la puissance turque loin de ses côtes.

Le missile de croisière Atmaca UM de Roketsan bat un nouveau record de portée TurDef
Le missile de croisière Atmaca UM de Roketsan bat un nouveau record de portée TurDef

Une transition technologique bien entamée

Les plateformes utilisées pendant Denizkurdu-II/2025 illustrent la volonté turque de s’affranchir des systèmes étrangers. Si certains missiles américains comme le SM-1 restent en usage, leur rôle devient secondaire. Place désormais aux armes « made in Türkiye » : missiles ATMACA, drones armés, navires de la classe MILGEM, et véhicules de surface sans équipage. La chaîne d’armement turque repose de plus en plus sur ses acteurs nationauxcomme Roketsan et Aselsan.

Une stratégie maritime assumée

L’exercice s’inscrit dans la doctrine « Mavi Vatan » (Patrie Bleue), qui affirme les ambitions maritimes d’Ankara sur ses zones économiques, en particulier face à la Grèce, Chypre ou l’Égypte. Face aux tensions régionales et à l’instabilité en mer Noire depuis la guerre en Ukraine, Ankara veut se positionner comme une puissance navale autonome. L’exercice vise à rassurer ses alliés de l’OTAN tout en discrètement les défiersur son indépendance stratégique.

Une participation massive pour un message clair

Par rapport à l’édition précédente, la mobilisation a atteint des sommets :

ÉditionNaviresAppareils aériensNiveau d’engagement
Denizkurdu 2021874075 % des moyens navals mobilisés
Denizkurdu 202512085Plus de 90 % de la flotte active

Avec 79 navires participant à des escales dans les ports chypriotes et méditerranéens, la Turquie combine présence navale et diplomatie militaire, tout en soulignant sa capacité logistique.

Source : Compte X Devrim Yaylali

À propos de l'auteur, Marc Basoli