Les Marines américains veulent équiper leur tout nouveau véhicule amphibie d’un système capable de neutraliser les drones, même en mouvement et sur l’eau, avec pour objectif une domination totale des côtes.
Face à l’explosion des menaces aériennes à basse altitude, les États-Unis réagissent avec une stratégie offensive : équiper leurs blindés amphibies les plus récents d’armes capables d’éliminer des drones en vol. L’option est désormais sur la table, et les premiers tests approchent. Le but : allier mobilité maritime, puissance de feu terrestre et défense anti-drone intégrée dans un même engin. Cette évolution technologique pourrait bien redéfinir l’avenir des combats côtiers et des débarquements.
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Un véhicule devenu une priorité stratégique
Le conflit en Ukraine a changé la donne pour les Marines américains. L’emploi massif de drones kamikazes et d’engins autonomes a révélé une vulnérabilité majeure sur le terrain : les blindés classiques deviennent des cibles parfaites. Le nouveau véhicule amphibie ACV, pourtant conçu pour remplacer l’ancien modèle AAV, n’échappe pas à cette règle. Le colonel Tim Hough, responsable du programme, l’a reconnu sans détour : les drones sont aujourd’hui au cœur des priorités de modernisation. Et si le véhicule amphibie est conçu pour résister à la mer et au combat terrestre, il doit désormais faire face à une menace venue du ciel.
Un équilibre délicat à préserver
Le problème, c’est que l’ACV n’est pas un blindé comme les autres. Il doit propulser ses 32 600 kg à travers plus de 22 km d’eau avant d’atteindre la côte. Chaque ajout – radar, canon, antenne, tourelle – pèse lourd, et menace cet équilibre délicat entre mobilité maritime et efficacité au combat.
Le Pentagone explore donc des solutions légères, comme un radar anti-drone intégré à la tourelle ou un module de brouillage compact. Mais chaque gramme compte, et le moindre composant supplémentaire doit être rigoureusement testé avant d’être validé.
Les versions armées déjà en préparation
Alors que le véhicule de base est déjà opérationnel, deux variantes supplémentaires sont en cours de développement. L’une, appelée ACV-30, embarquera un canon automatique de 30 mm, capable de neutraliser des véhicules blindés légers. L’autre sera dédiée aux missions de dépannage et de récupération, avec une grue embarquée.
Variante | Fonction | Date de disponibilité |
ACV standard | Transport blindé amphibie | Déjà en service |
ACV-30 | Appui feu avec canon de 30 mm | 2026 |
ACV-R | Maintenance/dépannage avec grue | 2027 |
Ces nouvelles versions renforcent les capacités terrestres du corps des Marines, mais l’ajout d’un système anti-dronesviendrait compléter l’ensemble pour en faire un engin totalement polyvalent.
La tentation de l’anti-drone intégré
Plusieurs technologies sont actuellement étudiées : radars à haute fréquence, brouilleurs directionnels, ou même canons électromagnétiques à impulsion. Le but : intercepter les drones avant qu’ils ne puissent atteindre leur cible.
Le colonel Hough évoque une “recherche de marché” ouverte, où toutes les options sont considérées. Les critères sont stricts : poids limité, réactivité immédiate, compatibilité avec les systèmes embarqués. L’ACV pourrait ainsi devenir le premier véhicule amphibie de l’histoire à combiner une mobilité maritime avec une capacité défensive active contre des essaims aériens.
Des attentes techniques bien précises
Pour réussir cette intégration, les ingénieurs doivent aussi résoudre plusieurs défis :
- Réduire le bruit des moteurs pour éviter la détection ;
- Améliorer la maniabilité aquatique malgré l’ajout d’équipements ;
- Intégrer une automatisation partielle des systèmes pour alléger la charge cognitive du pilote ;
- Offrir une vision 360° à l’équipage grâce à des caméras périmétriques.
Ces points d’amélioration visent à transformer l’ACV en plateforme adaptable, capable d’évoluer selon le théâtre d’opérations – qu’il s’agisse d’un littoral hostile ou d’un environnement urbain dévasté.
L’apprentissage du passé guide l’avenir
En 2020, un ACV a coulé lors d’un exercice, entraînant la mort de 9 soldats. Depuis, l’ensemble du programme a été renforcé : nouveaux tests de cybersécurité, vérifications des capacités sous-marines, contrôles rigoureux sur les limites de surcharge.
Les responsables militaires veulent éviter toute précipitation. L’ajout d’une capacité anti-drones ne se fera que si elle respecte les normes de sûreté navale, les exigences logistiques et la compatibilité tactique avec le reste de la flotte blindée américaine.
Vers une guerre des drones à très courte portée
Les Marines ne sont pas les seuls à avancer sur ce terrain. L’armée de l’air dispose déjà du système ExDECS à micro-ondes. Le système MADIS, monté sur véhicules légers, est utilisé depuis 2019 pour neutraliser des drones iraniens. Mais embarquer une telle puissance sur un véhicule amphibie reste un défi inédit.
Si le projet aboutit, les États-Unis pourraient déployer un engin capable de débarquer, de progresser sur terrain ennemi, de détruire des blindés… et de balayer des nuées de drones en approche. Une perspective qui pourrait bien rebattre les cartes dans les conflits futurs.
Source : Baesystems