Le Lhasa, fleuron chinois qui s’affranchit de l’horizon.
Le destroyer chinois Lhasa, déjà considéré comme l’un des plus redoutables navires de guerre de la planète, vient de franchir un nouveau cap. Grâce à l’intégration de données provenant d’avions de détection avancée (AEW), le bâtiment voit son rayon d’action décuplé, transformant ses capacités en un atout stratégique de premier ordre pour la Marine de l’Armée populaire de libération (PLAN en acronyme anglophone).
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Le destroyer Lhasa peut désormais frapper 20x plus loin avec une nouvelle mise à jour
Dans un exercice récent, le Lhasa a démontré qu’il pouvait engager des cibles aériennes et maritimes bien au-delà des limites imposées par la ligne d’horizon radar d’un navire classique. Jusqu’ici, les radars de bord, même perfectionnés, peinaient à dépasser les 30 à 40 milles marins, surtout pour des cibles volant bas comme les missiles rase-vagues.
En exploitant les données fournies en temps réel par les avions AEW et les hélicoptères embarqués, le Lhasa peut désormais identifier et frapper des menaces situées à 250 voire 300 milles marins. Résultat : la portée effective de ses missiles YJ-18 (470 à 530 kilomètres) et YJ-21 (plus de 960 kilomètres) est enfin pleinement exploitée.
Un concept de guerre en réseau qui change la donne
La marine chinoise applique ici son modèle opérationnel « A-détecter, B-lancer, C-guider » : la détection, le tir et le guidage sont confiés à des plateformes différentes, créant un maillage dynamique et difficile à neutraliser. Ce réseau, en reliant senseurs et missiles sur mer et dans les airs, réduit la vulnérabilité et accélère la réactivité.
Le Lhasa, pivot de la projection navale chinoise
Mis en service en 2021, le Lhasa impressionne déjà par ses chiffres : 12 000 tonnes de déplacement, 112 cellules de lancement verticales et un radar actif AESA bi-bande. Ces caractéristiques en font un adversaire de taille pour toute flotte qui s’aventurerait trop près.
Son système de défense aérienne HQ-9B, capable d’atteindre 260 kilomètres, trouve dans cette mise en réseau un complément naturel. Les angles morts de détection sont comblés, renforçant la défense de zone et la capacité du navire à opérer en toute confiance, même face à des attaques combinées.
Une stratégie qui s’inscrit dans un contexte global
Les ambitions de Pékin ne se limitent pas à la mer de Chine méridionale. Le Lhasa et ses futurs jumeaux de la classe Type 055 s’inscrivent dans une logique plus vaste : celle de la guerre en réseau ou « mosaic warfare » selon les experts. Un concept proche de celui du Joint All-Domain Command and Control (JADC2) américain, où chaque capteur, chaque arme et chaque plateforme sont pensés pour former un système adaptatif et modulaire.
Cette capacité à coordonner en temps réel les forces navales, aériennes et spatiales redéfinit l’équilibre stratégique dans le Pacifique et au-delà.
Vers une puissance navale en profondeur
Avec ce bond technologique, le Lhasa n’est plus seulement un destroyer de surface. Il devient un centre de commandement mobile, capable de coordonner des frappes au-delà de l’horizon et de protéger ses propres formations contre des menaces venues du ciel ou de la mer.
Dans un monde où les eaux internationales sont de plus en plus disputées, la mise en service de telles capacités n’est pas un détail. Elle traduit la volonté de la Chine de tenir tête aux plus grandes marines du monde, tout en s’affranchissant des limites imposées par la géographie et la physique.
Le Lhasa, silhouette discrète sur les flots, est aujourd’hui l’illustration la plus visible de cette montée en puissance.
Fiche technique du destroyer Lhasa
Caractéristique | Lhasa (Type 055) | USS Zumwalt (classe Zumwalt) |
---|---|---|
Déplacement | 12 000 tonnes | 15 700 tonnes |
Longueur | 180 mètres | 190 mètres |
Largeur | 20 mètres | 24,6 mètres |
Vitesse maximale | 30 nœuds (estimée) | 30 nœuds |
Propulsion | 4 turbines à gaz QC-280, 2 hélices | Integrated Power System (IPS), 2 turbines Rolls-Royce MT30, propulsion électrique intégrale |
Cellules de lancement vertical (VLS) | 112 VLS | 80 VLS (Mk57 Peripheral VLS) |
Armement principal | Missiles YJ-18 (470-530 km) Missiles YJ-21 (>960 km) Missiles HQ-9B (260 km) Canon de 130 mm |
Missiles Tomahawk (1 600+ km) Missiles SM-2/SM-6 Missiles ESSM 2 canons de 155 mm AGS (non utilisés à ce jour) |
Système radar | Radar AESA bi-bande | Radar SPY-3 X-band AESA + SPY-6 (pour remplacements) |
Équipage | 300-350 marins (estimé) | 140 marins (fortement automatisé) |
Rôle | Commandement, frappes longue portée, défense aérienne, anti-sous-marine, anti-surface |
Frappe longue portée (missiles Tomahawk), soutien terrestre, commandement, détection avancée |
Date de mise en service | 2021 | 2016 |
Prix estimé | Environ 700 millions à 1 milliard d’euros (estimation non officielle, donnée variable selon les sources chinoises et les contrats de construction navale) |
Environ 4,4 milliards de dollars US (environ 4,1 milliards d’euros, incluant développement, construction et tests initiaux) |
Observations sur les prix :
- Le Zumwalt a un coût de développement et de construction particulièrement élevé en raison de ses innovations (forme furtive, propulsion électrique intégrale, automatisation poussée).
- Le Lhasa est beaucoup moins cher (environ 4 à 6 fois), car il s’appuie sur une conception plus conventionnelle et une production en série plus optimisée.
Source : South China Morning Post
Image : Destroyer Lhasa retouché avec Canva pour ajout du drapeau de la République Populaire de Chine