Armée française : 27 000 recrues à trouver chaque année, le casse-tête de la guerre des talents.
Des tanks, des Rafale, des satellites… mais sans soldats pour les faire fonctionner, tout cela reste à l’arrêt. Derrière les milliards d’euros votés dans les lois de programmation militaire, il y a une réalité plus terre-à-terre : il faut des bras, des cerveaux, et des vocations. Et aujourd’hui, recruter dans les rangs de l’armée française relève presque d’un exercice de haute voltige.
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Une pression géopolitique qui stimule… ou qui freine le recrutement en France pour nos armée ?
Dans une salle de sport de Rueil-Malmaison, on ne prépare pas une compétition, on prépare l’avenir. De jeunes adultes, à peine la vingtaine, viennent discuter avec des militaires en uniforme, découvrir les parcours possibles, sentir l’ambiance. Ils ne fuient pas l’actualité tendue, ils s’en nourrissent.
L’un d’eux résume : « Ça met un peu de pression, mais justement, ça me motive à m’engager. »
Depuis la guerre en Ukraine, les tensions en mer de Chine, ou encore les actes terroristes sporadiques, la question militaire est redevenue centrale dans le débat public. Et paradoxalement, cela peut raviver certains élans patriotiques.
La France modernise son armée en Afrique avec un monstre technologique venu des airs
Une armée = 400 métiers
En 2025, 27 000 postes sont à pourvoir dans l’armée française, tous corps confondus. Terre, mer, air… et espace. Le spectre des compétences recherchées est bien plus large que ce que l’imaginaire collectif laisse croire.
Opérateur en cyberdéfense, mécanicien aéronautique, gestionnaire logistique, plongeur-démineur, conducteur poids-lourd, ingénieur en IA appliquée… La palette est vaste, mais trop peu connue.
« Les jeunes viennent avec des clichés. Ils ne savent pas que l’armée cherche aussi des spécialistes informatiques », confie le colonel Pierre-Antoine Simon, responsable du recrutement pour l’Île-de-France et l’outre-mer.
Un recrutement qui va s’accélérer malgré les défis d’ici 2030
L’objectif est ambitieux : passer de 201 000 militaires à 275 000 d’ici 2030. Soit une augmentation de 37 % des effectifs en cinq ans.
Ce bond prévu dans la loi de programmation militaire repose sur deux conditions : que l’armée garde ses personnels expérimentés, et qu’elle réussisse à recruter massivement tous les ans.
Or, la concurrence est rude : police, gendarmerie, sécurité privée, BTP, logistique… Tous cherchent du personnel, souvent avec des horaires plus prévisibles et sans contrainte de mobilité.
Séduire sans travestir le métier
Pour attirer, les campagnes de recrutement se modernisent. Fini les spots austères : aujourd’hui, on fait appel à des influenceurs, à des simulateurs de réalité virtuelle, et à des stages de découverte en immersion dans les régiments.
On trouve même des recruteurs à la sortie des lycées, ou lors de forums professionnels organisés dans des zones peu urbanisées. Là où les débouchés sont rares, l’armée devient une voie possible, parfois perçue comme un ascenseur social.
Mais les recruteurs restent francs : « L’engagement militaire, ce n’est pas un job comme les autres. C’est un contrat de disponibilité, d’endurance, et de service. » Il faut aimer les réveils à 5h30, les missions à l’étranger et les entraînements sous la pluie.
La stabilité, un argument qui commence à peser
Face aux incertitudes du monde civil, l’armée française mise aussi sur ses contrats longs, sa formation gratuite, et ses perspectives de carrière. À 21 ans, un caporal peut être chef d’équipe. À 35, un sous-officier peut gérer une base logistique à l’étranger.
Les rémunérations démarrent autour de 1 500 euros nets par mois pour un engagé volontaire, avec logement, repas, transport et uniforme pris en charge. Au fil des années, certains atteignent 2 000 à 2 800 euros nets, selon leur grade et leur affectation.
Sans compter les primes de terrain, les reconversions facilitées, et l’accès à des formations diplômantes internes.
Un enjeu stratégique… et existentiel
À l’heure où la France veut redevenir une puissance d’influence autonome, où elle déploie des troupes dans le Pacifique, en Afrique et en Europe de l’Est, disposer d’une armée complète et bien formée devient un enjeu de souveraineté.
Mais cette souveraineté passe aussi par une adhésion des citoyens. Et en 2025, le vrai défi n’est peut-être pas de former plus de soldats. C’est de convaincre la société que le métier de soldat a encore du sens.
Source : https://www.franceinfo.fr/replay-jt/france-2/13-heures/armee-francaise-le-defi-du-recrutement_7112241.html
Image : VAB de l’Armée de terre aux nouvelles couleurs, vu après le défilé du 14 juillet 2021.